La Beauté physique, la nôtre ou celle des autres, tient une grande place dans nos vies à tous… Bien plus grande sans doute que nous n’aimons à le reconnaître…
Pour Barbey, il faut garder en tête son point de départ biologique et psychologique : le jour de sa naissance, – le Jour des morts ! –, il a failli mourir d’un cordon ombilical mal noué et ce ne sont même pas ses parents qui l’ont remarqué…
Tout cela est lié au thème de l’esthétique. Pourquoi ? C’est que Barbey relie ces faits à une ritournelle douloureuse pour lui : « Mon adorable famille m’a toujours chanté que j’étais fort laid[1] » ( en particulier sa mère qui était très jolie, et si froide avec lui) et qu’il a pris cela pour une tentative d’homicide involontaire de la part de ses parents…
La Beauté est un don ! entend-on parfois. Un don de qui ? serait-ce pas plutôt un don que nous faisons à celui que nous trouvons beau ? En effet le bébé percevrait des traits physiques de qui a satisfait à ses besoins, traits liés ensuite à la santé, la fécondité, la vitalité et les « nomme » Beauté.
Du temps de Barbey, on entendait sans doute assez souvent : « La Beauté est un don de Dieu ! ». C’est tout aussi bizarre, mais en pire… Dieu est-il injuste ? Comment vivre si on se sent laid ? Que faire de la Beauté ?
Il retournera ces questions d’esthétique et de religion tout au long de ses 81 ans de vie et il évoluera dans ses réponses et ses réactions de façon frappante, parfois inattendue, souvent paradoxale.
Généralités[2] et points de départ aurevilliens
Le goût de la vie allait chez lui de pair avec l’amour de la beauté. Il l’aime tant qu’il ne dit pas quand il en souffre, et ne jalouse pas ceux qui sont beaux. Un des cris les plus poignants du Premier Memorandum : « Ah ! mon Dieu! mon Dieu! que c’est beau d’être beau ! » [3]
A l’époque de son enfance, 4 approches comportementales, morales et/ou religieuses de l’esthétique dominaient et l’ont influencé au départ.
1) Première approche : la physiognomonie, pseudo-science qui répond à un souhait inconscient de notre instinct de survie de base : ce serait bien « pratique » que les intentions des autres à notre égard et leur caractère soient toujours manifestes ! Elle eut un grand succès du début du XVI° siècle jusqu’en 1660. La « métoposcopie » ou sémiologie de la marque alla jusqu’à se fonder sur des indices corporels[4] pour rendre justice. Lavater, pour plus de rigueur, y ajouta l’anatomie[5], d’où un grand succès de 1780 [6] à 1850 pour ce système fondé en partie sur l’hérédité et donc sur la race : finesse de la peau, nez racé, attaches élégantes, haute taille etc. sont des signes physiques qui ne trompent pas, vont de pair avec des caractères innés, fondent des privilèges sociaux … et même des droits « naturels » à plus d’intelligence…Quoiqu’il en eût, Barbey crut à cela : il était grand, signe de race, mais il était laid, signe de défauts chez lui…
2) Deuxième approche : des morales à tonalité philosophique qui veulent appuyer une éducation où le souci de la beauté entraîne la nécessité de se contenir :
-Dans la perspective rationnelle, la beauté naît de l’ordre intelligible, de la rationalité et de la simplicité. Le laid étant désordre et anarchie, ce qui relève de la passion est donc laid.
-Dans la perspective du « goût », au XVIII°, le bon goût est irrationnel certes, mais la laideur résulte de l’anarchie des sentiments, (la vulgarité), jointe à celle des motifs rationnels : c’est une faute de goût.
On lui enseigna donc à se contenir autant par politesse que par souci esthétique. Mais se maîtriser peut aller très loin, jusqu’à la dissimulation. Cela peut fonder un comportement comme le dandysme ou une écriture comme celle du masque.
3° ) Troisième approche : des systèmes philosophiques qui stigmatisent la laideur :
Bien des philosophies qu’il a dû entendre cherchent à expliquer et cette « injustice » des dons et des handicaps qui nous rend tous différents, et cette force instinctive qui nous attire ou nous repousse suivant des critères esthétiques divers et relatifs…
Que ressentait-il alors en découvrant par exemple l’esthétique vue dans la perspective ontologique médiévale : s’il y a de l’être, il est beau ; le laid n’est donc en fait qu’un manque d’être. A la limite, aimer du laid serait un péché…
4° ) Quatrième approche enfin : la religion catholique, qui présentait un Dieu père créateur tout puissant.
Elle postule qu’Il a créé l’homme à son image et que sa Providence « dispense » les dons. Comme le besoin d’harmonie et de logique pousse l’homme à trouver des liens, inexistants peut-être mais rassurants, entre l’invisible et l’apparence, une certaine logique de « justice » considèrera que la tare physique ne peut pas être injuste et donc qu’elle « manifeste » qu’on est mauvais, et inversement, que la beauté physique traduit la beauté morale et religieuse d’une personne. C’est agréable pouvoir de lier le beau visible au bon, (qu’il soit d’ordre intellectuel, moral, religieux, etc.), mais la réciproque, qui lie le laid au mauvais, impose un fardeau supplémentaire à ceux qui sont disgraciés… C’est en fait une sorte d’idéalisme frivole, sensuel et matérialiste, une idolâtrie romantique pseudo-religieuse de la beauté[7]… qu’Ernest Seillière nomme le « mysticisme esthétique ».
Barbey fut éduqué dans ce pseudo-platonisme[8] religieux trop axé sur un « corps » prédestiné – et répondant à la question « pourquoi » par un « c’est Dieu qui l’a voulu »… fataliste et passif.
Autre fait à ne pas négliger : la morale religieuse présente la Beauté physique comme inférieure à la Beauté morale, spirituelle ou religieuse, ou même comme dangereuse.
On mesure, pour le jeune Jules, les incidences de cette « religion » dans la vie sociale ou inversement.
Les 4 approches qu’on a vues sont en relation avec l’esthétique, la morale et/ou la religion.
Acceptation d’un destin inscrit sur le corps ? Savoir-vivre qui est en fait un devoir de se taire ? Mysticisme esthétique ? Religion mal bâtie qui fait un Dieu injuste et un monde avec des ratés ? De nombreux textes montrent qu’il a lui-même commencé par accepter comme véritables et bonnes, ces 4 approches et les a appliquées à autrui… et aussi sur lui-même.
Nous partirons de « l’extérieur », un peu à la façon de Maslow, pour expliquer comment il évolua, en nous guidant sur l’ordre de composition des textes.
D’un corps-prison imposé à un corps maîtrisé
A le lire, quand il commence à écrire, Barbey croit encore dans la physiognomonie[9], – conviction cruelle pour quelqu’un de sensible, de laid et d’esthète…Puis il observe des exceptions, et perçoit la faiblesse de ce système.
A partir de 1850-1855, il l’abandonne, mais conservera toujours la notion de race ou de type à cause du thème (romantique) de la fierté de ses origines. C’est alors la physiologie qui a sa faveur : qualités et défauts du corps influencent l’âme. Puis il inverse le raisonnement : c’est l’âme qui influe sur le corps. Ce qui l’amène à faire confiance à la physionomie : l’aspect physique garde son rôle signifiant, mais n’est plus imposé de naissance : c’est l’individu qui « modèle » son physique par ses actes, ses pensées, ses sentiments etc. La beauté extérieure n’est donc plus le signe exclusif de la bonté de l’âme ou de l’intelligence.
Il s’évade ainsi, par tâtonnements successifs, de la conception d’un corps-prison et d’un Destin individuel quasi-prédéfini.
Le Dandysme comme réponse à la laideur, adressée aux hommes… et à Dieu ?
L’obligation de se contenir, le « mysticisme esthétique » et la Foi en un Dieu créateur et dispensateur de la beauté et de la laideur l’ont fait souffrir jusqu’à la révolte.
Souvent, un dandy s’oppose en s’adaptant, à sa manière, à ce qui le révolte. De ce point de

vue, Barbey utilise de façon provocante ou perverse l’habitude de se masquer et de contenir… Son dandysme à ses débuts consistait, entre autres, à changer autant qu’il le pouvait ce corps … ou, par la suite, à en modifier la perception qu’en avaient les autres, moyen plus subtil, mais peut-être plus réalisable !
Or les textes montrent que, dès 1845, Barbey a dissimulé sous l’habit de lumière du dandy bien des choses, et entre autres, l’inquiétude religieuse.
Ainsi la relation complexe entre esthétique, morale et religion est évidente dans cette confidence de 1856 qui se clôt par deux vers d’un de ses meilleurs amis : Baudelaire.
Ah! Seigneur, donnez-moi la force et le courage
De contempler mon coeur et mon corps sans dégoût ! « [10]
Une société soi-disant religieuse…
Il se révolte également contre les manquements de ses parents aux principes chrétiens, et en particulier contre leurs railleries cruelles sur sa laideur. Il refuse une religion qui aboutit à une société passive et hypocrite, et en plaint les victimes comme lui, victimes d’une esthétique qui n’a rien de religieux ni d’éthique, et frôle même l’immoral en ce domaine.
Une vieille maîtresse démasque le Faubourg Saint-Germain, un milieu en fait esthète et libertin avant tout, qui se dissimule hypocritement sous les apparences de la convenance… Prosny questionne : « Mais comtesse, quand je vous accorderais qu’elle est laide comme… tout ce qu’il y a de plus laid, n’êtes-vous pas des spiritualistes dans votre Faubourg Saint-Germain ? ». Le mariage de Ryno avec Hermangarde se fera, démontrant ainsi ( et Barbey y insiste dans sa seconde préface) les incohérences de cette religion des apparences et de la Beauté…! Il maintiendra ce texte même dans les publications postérieures à 1846, date de sa conversion.
D’un Dieu, mauvais gestionnaire de la Beauté à un Dieu innocent…
Physique relativisé, dandysme passionné et douloureux, religion démystifiée… trois exemples d’évolutions au niveau comportemental. Mais Barbey s’attaque ensuite au problème plus abstrait, ou plus profond, de l’esthétique et de la religion.
Si Dieu est Créateur et tout Puissant, de type parental, s’il crée du laid et le « donne » à certains, si la beauté physique n’est pas donnée à tous ou inséparablement de la beauté morale ou intellectuelle… et si on a la Foi, on doit logiquement se résigner ou se révolter. Barbey se révolte d’abord
En 1834, dans Oh! Pourquoi voyager, un amant se dit obligé de fuir sa maîtresse destinée à se faner et en rejette avec provocation la responsabilité sur Dieu puisque « Dieu ne veut pas qu’elle soit immortelle! »…
En 1836, des presque blasphèmes se cachent derrière l’humour autorisé en parlant d’une inconnue tentante dans la pauvreté qu’on pourrait former pour le plaisir : « Elle serait un fléau, un de ces beaux fléaux de Dieu, un de ces Attilas femelles qui ravagent le monde sans épée… Est-ce que quelque honnête vaurien ne la tentera pas comme le Diable fit pour Jésus, sur la montagne, et ne l’emmènera pas à Paris, la patrie de tout ce qui est beau? En vérité, il y aurait plaisir à laver, parfumer ce bel animal, à le dresser, à lui apprendre son métier de femme et à l’initier à la vie des sensations pour laquelle elle fut créée, (à moins que la Providence n’y voie goutte) de toute éternité. » [11] Puisque c’est Dieu qui fait et répartit beauté et laideur, que c’est Lui qui rend désirable la Beauté, il est donc le grand Tentateur…[12]
La beauté est chose injustement distribuée, injustement reprise… ce qui pose un problème théologique et un problème humain : quand la petite vérole frappe les jolies filles de Paris, Barbey accuse « Dieu, dans sa solitaire ironie » : « Moi qui suis laid comme un Pirate, la petite vérole n’a rien à me dire, et je me moque d’elle. » [13] Même s’il faut faire la part du jeu de mots, il se dégage de ce pétillement spirituellement blasphématoire l’idée que le monde est mal fait… [14]
Cependant Barbey se convertit autour de 1846 et l’on perçoit ce changement également à travers les considérations esthétiques.
Ainsi, en 1851, il trace un portrait d’Eugénie de Guérin, qui en fait saillir toutes les contradictions théologiques et humaines – qu’il comprenait ô combien : laide et croyante,

dotée d’un corps maigre, – elle « souhaita la beauté »… alors que c’était presque une sainte. Et Barbey d’ironiser – contre Eugénie trop naïve autant que contre Dieu ! – : « bien entendu, elle resta laide ». [15]
En 1855, il en écrit la notice nécrologique et rappelle – encore – ses efforts sublimes pour surmonter sa laideur. Il la cite : «Nous avons tous une beauté divine, la seule qu’on doive aimer, la seule qu’on doive conserver pure et fraîche pour Dieu qui nous aime. » Simple et profonde manière de se voir et de s’accepter qu’elle eut toute sa vie et qui aurait sauvé Mme de Staël qu’on appelle une laide de génie, de ses tristesses sans grandeur! »[16] La faible consolation que se trouve semble adoptée par Barbey : une sublimation dans la dignité.
Cette accusation contre un Dieu dispensateur de laideur et de beauté disparaît progressivement et n’est plus retrouvée à partir des années 1865, même sous forme de plaisanterie ou de rhétorique…
C’est que Barbey a complètement modifié sa façon de définir Beauté et laideur
Son évolution au sujet de la Beauté en tant qu’objet de son litige avec Dieu
Sur une période qui dure à peu près jusqu’au Chevalier Des Touches, Barbey s’attaque à cette esthétique qui mettait la Beauté au pinacle des valeurs intouchables et éternelles et la détruit avec méthode.
Périssable, sa perte est d’autant plus redoutée qu’on lui avait donné plus d’importance. Céleste et parfaite, elle est si fragile qu’elle est prédestinée à mourir [17], ou bien elle est frappée à proportion, de fragilité, de bêtise, de malheur, ou de mort.
Inversement, il valorise la laideur : elle n’avait qu’un seul usage positif : ajouter un peu de piquant à au Beau pour qu’il soit parfait ; il va la qualifier de façon positive.
Par exemple, plusieurs fois, il en parle de façon supra-laudative : La Croix-Jugan rejette enfin son capuchon, et la foule, précise-t-il, trouve tant de plaisir à voir cette laideur « idéale »[18] et » sublime « [19] qu’elle le croit enfin sauvé, puisque la symbolique fonctionne en miroir et entraîne chez tous un jugement moral fondé sur une équivalence beauté-laideur… : le mécanisme du « mysticisme esthétique » est donc ici retourné en « mysticisme de la laideur ». Néanmoins, Jehoël ne trouvera pas le repos éternel, ce qui montrera que la foule avait tort dans cette déduction, même si la laideur, découvre Barbey, peut exercer une attraction mystérieuse, au même titre que la Beauté.
Après ce voyage dans les extrêmes, chez Vellini, Jéhoël et Hermangarde, Barbey se trouve dans une impasse et devant des choix éthiques, moraux et esthétiques…
Il s’en sort en concluant que ce qui compte pour apprécier la Beauté, c’est l’humain, et non le physique et en arrive à décomposer la laideur selon deux types : la laideur physique qui n’appartient pas – ou plus exactement n’appartient plus – aux catégories du Bien et du Mal, et la laideur morale qu’on doit/devrait repousser dans tous les cas.
La conversion s’ajoutera progressivement à la réflexion. Mais on n’en est pas encore à des thèses religieuses…
A partir de 1852, (Un prêtre marié), la Beauté physique devient une richesse toute relative par rapport à la beauté morale ou religieuse… Le corps est zone périlleuse pour l’être humain qui doit donner primauté au spirituel. Avec Sombreval, les personnages beaux seront ambivalents et les personnages sympathiques seront souvent laids : ceci n’étant valable que pour les personnages principaux. Il utilise d’ailleurs une technique d’écriture intéressante dans le cas des personnages disgraciés : il crée d’abord une impression favorable et retarde leur description physique le plus possible.
La laideur reprend ensuite une place plus banale et les commentaires sur ce sujet disparaîtront quasiment des Diaboliques. C’est que Barbey a presque fait table rase des fausses conceptions qu’on lui avait inculquées et essaie désormais de bâtir « sa » Beauté.
Oui, la sienne : dans la vie ou dans ses romans, les êtres « beaux » seront de plus en plus ambivalents sur le plan moral.[20] Non seulement on peut « se passer » de la Beauté, mais elle est parfois nuisible ou fausse : elle peut servir de masque, devenir signe et présager le Mal…Beauté et laideur sont dépouillées de tout déterminisme, des simplifications manichéennes et réductrices : tout dépend de l’individu.
C’était contre cette théorie de la laideur liée au mal qu’il s’était violemment révolté, blessé qu’il était, mais il ne s’était pas encore opposé à cette théorie de la Beauté signe du Bien : cette nouvelle découverte, – que la Beauté cache souvent des valeurs négatives -, est importante.
Les premières révoltes contre les tentations d’une dichotomie symboliste et simpliste aboutissent ainsi à une philosophie de l’idée platonicienne mieux comprise, où la beauté physique doit être soumise à celle de l’âme, en raison de valeurs plus hautes : philosophiques ou religieuses.
Le « mysticisme esthétique » a donc disparu et, du coup, avec lui, les griefs envers un Dieu qu’il a découvert injustement accusé d’être injuste…
La Beauté en tant qu’enjeu très disputé entre religion, morale, littérature et art.
A l’époque où Barbey commence à publier, un livre doit faire agir de beaux personnages, beaux dans tous les sens du terme, les mauvais, laids, n’étant là que pour faire valoir la morale…
Des artistes et des écrivains avaient déjà soutenu au contraire que la laideur physique n’appartient pas aux catégories du Bien et du Mal, mais tous pensaient – et voyaient bien…- qu’un livre qui ne conterait que belles actions et saints personnages serait un peu trop » catholique » (au sens le plus large !) pour être intéressant esthétiquement…
Barbey se heurte à ce problème dans Un prêtre marié qui fut composé de 1855 à 1864. Il a conscience que l’homme s’intéresse plutôt à » la beauté attristée, la suavité du mal et de la nuit, l’attrait des coupables mystères »[21], réflexion philosophique et théologique qui lui était déjà venue dans L’Ensorcelée. C’est aussi un problème à la fois de goût littéraire et artistique, et de « fins de mois » très concrètes qui est posé : le succès semble difficile avec uniquement des personnages « moraux » dotés d’une beauté parfaite… C’est pourquoi il rend attirante et proche la Beauté d’un personnage « moral » en l’altérant par un (petit) défaut : par exemple une cicatrice chez Néel, ou chez Calixte un bandeau mystérieux qui éveille des suppositions scandaleuses ( mais cache en fait le sceau de Dieu sur elle)[22].
Puis les valeurs morales vont dominer, théoriquement au moins, le souci esthétique et intellectuel : en 1860, c’est à son frère Léon, prêtre eudiste, qu’il dédicace le premier tome des Oeuvres et des Hommes qui concerne philosophes et écrivains religieux, son frère, le mieux placé pour juger d’une oeuvre puisqu’il a « la grâce d’état ».[23] C’est de sa part reconnaître les droits de Dieu sur la création littéraire, l’esthétique et la Beauté !
En 1860 encore, le chrétien Barbey donne un point de vue théologique correct sur le Curé d’Ars, si ignorant, si opposé à l’esthétique mondaine et pourtant si écouté : «écrasante leçon donnée à ceux qui aiment le beau ! La conscience, même à ce point de vue de la beauté, est aussi puissante que le génie.»[24]
Il va jusqu’à abandonner l’idée d’une suprématie de la Beauté, même artistique : «Pour nous qui ne croyons pas que l’art soit le but principal de la vie et que l’esthétique doive un jour gouverner le monde, ce n’est pas une si grande perte qu’un homme de génie, tandis que nul n’est dispensé d’être une créature morale et bienfaisante, un homme du devoir social ! » [25]
Barbey écrit-il que les Anges éprouvent de la douleur devant les impiétés ? Ce même frère prêtre le corrige aussitôt : les Anges ne sauraient « souffrir » ! et il ajoute[26] avec autorité : « J’ai cru devoir te faire cette observation, pour t’engager à modifier quelque chose de très beau au premier coup d’oeil, mais qui après tout n’est qu’un mirage, en raison de cet immortel principe :
« Rien n’est beau que le vrai, le vrai seul est aimable. »
Tu verras aisément comment ton génie peut s’emparer de cette idée pour faire resplendir, à l’endroit indiqué, des magnificences de sentiment et de style qui soient dans les convenances absolues de la vérité catholique.
Il est certain que, mises dans leur vrai jour, les choses religieuses sont un trésor inépuisable de ressources poétiques pour l’artiste. La Religion, étant l’oeuvre du Dieu vivant, de celui qui est la Beauté essentielle et éternelle, et renferme par-là même toute vérité et toute beauté. N’entrevois-tu pas déjà tout ce qu’il y aurait à dire sur ce sujet, dans un traité de l’Art chrétien? »
Cette remarque, bien caractéristique, de la position de l’Eglise au sujet de l’art, ne sera guère suivie d’effet en réalité… Certes il a relativisé de mille façons l’importance du beau physique, charnel, et a consenti à « humilier » la beauté devant la religion, mais il n’a pas changé d’esthétique dans ses œuvres.
On le voit particulièrement bien à propos d’une Une Vieille Maîtresse, lors de sa 3° édition… Il l’a entreprise alors qu’il ne « pratiquait » plus, s’est converti au beau milieu, l’a publiée en 1851 avec une préface banale, et l’a rééditée telle quelle en 1858 avec une préface qui stigmatisait l’hypocrisie du Faubourg Saint Germain[27], se faisant ainsi des ennemis des deux côtés ! En 1865, ses positions ultra-catholiques sont connues, c’est pourquoi il prend les devants avec une troisième Préface qui ne semble s’adresser qu’aux Libres-Penseurs refusant qu’un romancier catholique peigne – si bien! – la passion physique quand elle est condamnable… Son plaidoyer s’adresse également, fort habilement à l’Eglise dont son frère ou Veuillot ne sont que des exemples, en redonnant au romancier catholique le droit de peindre le corps avec toutes ses séductions concrètes, « la Nature humaine toute entière et ses diverses sphères d’activité () Le catholicisme n’a rien de prude, de bégueule, de pédant, d’inquiet. Il laisse cela aux vertus fausses, aux puritanismes tondus. Le catholicisme aime les arts et accepte, sans trembler, leurs audaces. Il admet leurs passions et leurs peintures, parce qu’il sait qu’on peut en tirer des enseignements», pourvu que l’artiste ne dise « jamais que le mal est le bien et que le bien est le mal.( ) ». Il explique que le vice peut « salir » toute beauté, même Shakespeare, Michel-Ange, et même les vierges pures de Raphaël, mais il jette l’anathème sur Tartuffe, les puritains et Rousseau … « La vérité et la beauté, en quelque genre qu’elles soient, ne sont point retranchées ni abolies par le catholicisme qui est la vérité absolue. » Plus l’écrivain est vrai, – même scandaleux ! – plus il est catholique ! Il n’évoque même plus les erreurs « passées » du Dieu créateur et même l’absout totalement des péchés que les Hommes font à partir de sa belle création : « Est-ce que Dieu a prêté aux crimes et aux péchés des hommes en créant l’âme libre de l’homme ?Est-ce qu’il a prêté au mal que les hommes peuvent faire, en leur donnant tout ce dont ils abusent, en leur mettant sa magnifique et calme et bonne création sous leurs mains, sous leurs pieds, dans leurs bras ? … (..) L’artiste crée, en reproduisant les choses que Dieu a faites et que l’homme fausse et bouleverse.
« Il est de viles décences » disait Rousseau.
Le catholicisme ne les connaît pas. »
En réalité, sur ce point de morale concernant l’esthétique, il se sent en plein accord avec Dieu, à l’aise dans le monde existant et dans sa Foi, même s’il y a un désaccord avec les censeurs, d’Eglise ou non …[28]
Il est assez rare en réalité que ce soit au nom du catholicisme qu’il joue son rôle de critique. Par exemple Le Sommeil, de Gironde, représente une superbe odalisque à demi-nue. Il est déçu que le peintre n’ait pas représenté en entier la nudité de cette femme, mais c’est pour une raison « laïque ». Le peintre s’est censuré certes, et cette « doctrine de moraliste honteux et incertain, ce n’est pas là une doctrine d’artiste » : et Barbey d’expliquer que ce dévoilement partiel naît d’une intention perverse car soi-disant pure : c’est un moyen calculé pour mieux attirer le spectateur. Le plus grave est que cette manœuvre est « banale », et c’est sur ce point que porte sa critique. (Le paradoxe est que certains de ses procédés romanesques s’y apparentent.)
Quant aux textes réalistes, il s’occupe peu de leur moralité mais les refuse pour leur vulgarité. Ainsi, en 1869, il affirme que Duranty se trompe lui, qui va » s’imaginant que tout est plus vrai dans la vie à proportion que tout est moins beau, (…) erreur inouïe! la beauté peut être plus rare, mais elle n’est pas moins vraie que la laideur. »[29] Flaubert, dans L’Education sentimentale lui semble aussi faire fausse route : » L’Art doit avoir pour but unique la Beauté, avec tous ces genres de beauté. Or la vulgarité n’est jamais belle, et la manière dont on la peint, ne l’ennoblissant pas, ne peut pas l’embellir. « [30] C’est également pourquoi Barbey, en 1879, dote Courbet d’une prétendue profession de foi qui détournerait tout peintre réaliste de la Beauté : « Pour lui, la hiérarchie entre les choses visibles n’existait pas, et le crapaud à peindre valait Apollon, et peut-être même valait-il mieux parce qu’il était rampant et laid, – c’est-à-dire plus près de la nature que de Dieu! « [31] Dieu est devenu alors pour Barbey une référence de Beauté…
A l’inverse, il loue la description du laid Bazile par Astruc, car il a réussi à le « traduire sans laideur, ce qui est l’art vrai – et l’art difficile. Exprimer en effet la laideur morale simplement par la laideur physique, dans les arts plastiques, c’est facile et grossier ! »[32] Laissons le côté le problème des relations entre réalisme et laideur dans l’art qui n’est pas notre propos. Ici, Barbey refuse que la laideur soit une – morale et physique, et que la laideur physique ne soit que la conséquence de la laideur morale qu’elle traduirait.
Il parle désormais d’esthétique comme n’importe quel critique d’art qui n’aurait pas eu un compte personnel à régler avec la Beauté…et ainsi, au salon de 1872, il ose plusieurs fois dire carrément que ceci ou cela est laid.
Il synthétise et commente, avec humour l’arrivée en force d’un nouvel art, la photographie, qui vulgarise les portraits : « En art, il n’y a rien de laid en soi, et tout peut être abordé. Ceci n’est pas faux à une certaine profondeur, et en l’expliquant ; mais comme c’est commode pour les gens laids, qui reculeraient pudiquement devant leur laideur ! Aussi en pleut-il des portraits ()Nous n’avons plus de ces timidités fières, de ces nobles peurs d’être en dessous de l’Idéal. »[33] Cette liberté de ton signale que Barbey n’a plus peur de son image.
Les besoins fondamentaux de la personne ( en particulier l’estime de soi ) sont à peu près remplis, les « obligations » de Lavater se retrouvent aux oubliettes, le faux mysticisme religieux est expurgé du faux platonisme matérialiste, et le critique, décomplexé, peut parler avec ses certitudes… et il en s’en prive pas !
Il affiche donc son goût pour la beauté, et se sent donc autorisé et par les autres, et par lui-même – à disserter sur elle, à lui fixer un sens, des canons, et à donner ses goûts en modèle aux autres… Quelle revanche ![34]
Il n’est pas toujours cohérent bien sûr… Morale, religion et esthétique se disputeront constamment la primauté chez lui.
« La Beauté est un don de Dieu ! or tu es laid … »
La souffrance née de ces mots a été comme le point de départ dynamique pour l’écriture, un principe qui explique certains paradoxes et contradictions chez lui, comme un élément possible d’unité. Cette souffrance lui a fait remodeler la beauté par une suite d’oppositions, d’abandons, et de reconstructions très personnelles…
Après sa conversion, l’effort pour être théologiquement correct semble intense, mais pas toujours suivi de succès ! Chaque fois qu’il a fait parler sa conscience (au sens moral et psychanalytique), il restaure une autre Beauté à la place suprême, une valeur instinctive, bonne, vitale, unique, essentielle, sous-tendue par des valeurs souvent morales et symboliques. Il affirmera même que la Beauté est une valeur inférieure au Bien défini par Dieu. Il fait cela en écrasant la plupart des approches de la beauté qui l’avaient fait souffrir, y compris le mysticisme esthétique, et cela au nom de la religion.
Tout ceci, non sans exceptions, contradictions et paradoxes, et avec une foi spectaculaire, aux particularités esthétiques, dandyque, altières et originales, dans une grande liberté de juger, de penser et de créer. Une liberté dans la Foi, dans l’agir et dans l’écrire, que Baudelaire analysait fort bien en disant que Barbey, jouant la comédie du blasphème, mais cachant ses convictions et ses bonnes actions[35], était l’ « Envers de Tartuffe »[36].
Marguerite Champeaux-Rousselot
Citer cet article :
«La Beauté, un “don de Dieu” ?!! Beauté, morale et religion chez Jules Barbey d’Aurevilly», par Marguerite CHAMPEAUX-ROUSSELOT, année 2008, publié sur https://recherches-entrecroisees.net/.
[1] Correspondance, 18 juillet 1835
[2] Cf. le site https://recherches-entrecroisees.net/.
[3] 6 octobre 1836. Œuvres complètes, Pléiade, Tome II p 765. Cité ensuite comme OC I ou II
[4] Entendons bien le mot « marque »: ce n’est pas une ride, mais un signe posé sur le visage, durable autant que l’individu, qui équivaut à son destin… Cela sert de véritable preuve pour certains. « Aussi Messieurs les Jurisconsultes (aussi bien avisés que doctes, sachant bien que comme le visage est le montre des vertus, qu’aussi l’est-il des vices) ont différé tel poids aux signes tirés de la face, que lorsque plusieurs criminels sont prévenus de quelque forfait, s’il est question d’en tirer la vérité par la violence, ils donnent la torture au plus difforme d’aspect de visage, selon les préceptes de leur doctrine. » J. Taxil, L’astrologie et la physiognomonie en leur splendeur, Tournon, 1614, page 6. On faisait la morale aux laids : voici les conseils moraux que, en 1603, G.B. Della Porta leur donne : « celui qui apercevra aux signes de son corps que son âme n’est nullement recommandable, qu’il s’efforce diligemment de compenser par l’exercice de la vertu les mauvais signes du corps. » Physiognomonie céleste, Naples, 1603, page 1 : son introduction.
[5] Véronique Grappe-Nahoum, Beauté Laideur : l’esthétique corporelle en question. Un essai de sémiologie historique ( France XVI°-XVIII° siècles). Paris V, 1985. Ed. Denoël, 1991, page 275. La physiognomonie stigmatise chacun, l’enferme dans un destin, et le « livre » aux autres… « Cette intextuation du corps répond à l’incarnation d’une Loi élitiste, inégalitaire ; elle la soutient, elle semble même la fonder, elle la sert en tout cas. » « La physiognomonie est une résolution sans scrupule de l’énigme esthétique qui a, pour longtemps, ridiculisé tout regard sur un corps au plan scientifique. » idem. Lavater fera d’ailleurs le lit de l’eugénisme.
[6] Les parents de Jules sont nés en 1785 et 1787.
[7] Pages 20-21 Barbey d’Aurevilly, ses idées, son oeuvre, Paris, Bloud et Cie, 1910.
[8] Qui dérive d’un « kalos kagathos » mal compris.
[9] Un exemple : Le portrait de la Grande Mademoiselle n’est pas fidèle, croit-il, parce qu’il « contrarie un peu les idées qu’on a à distance de Mademoiselle (…) tout cela a un faux air de Mme Sand quand elle était jeune… C’est là ma raison de douter de la ressemblance du portrait. » Cité p. 1446 Pléiade O.C. II ; en fait dans les Disjecta membra, Ed. La Connaissance, 1925. Autre exemple : volontaire et inspiré, Paul Delaroche peut, en conclusion et selon Barbey, être comparé à Napoléon : » Napoléon, ce terrible artiste, avait l’inspiration et la volonté à un degré égal, et ce n’est pas tout à fait pour rien que Paul Delaroche ressemblait de visage à Napoléon. « article sur P.Delaroche, publié le 2 mai 1857 dans Le Pays.
[10] Article refusé au Pays, 1857, cité dans Le XIX° siècle, Choix de textes établis par Jacques Petit, Mercure, Mercure de France, 1966, Tome II p.371. Ces vers sont précédés par ces mots : « On a beau être un artiste redoutable, au point de vue le plus arrêté, à la volonté la plus soutenue, et s’être juré d’être athée comme Shelley, forcené comme Leopardi, impersonnel comme Shakespeare, indifférent à tout excepté à la beauté comme Goethe, on va quelque temps ainsi, – misérable et superbe, – comédien à l’aise dans le masque réussi de ses traits grimés ; – mais il arrive que – tout à coup, – au bas d’une de ses poésies les plus amèrement calmes ou les plus cruellement sauvages, on se retrouve chrétien dans une demi-teinte inattendue, dans un dernier mot qui détonne – mais qui détonne pour nous délicieusement dans le cœur :.. »
[11] 18 septembre 1836, Premier Memorandum.
[12] Ou encore, autre façon de contester, poser la question pour montrer que le monde est mal fait : « La fille d’Yseult écumait de vie (…) Allan admirait la beauté de sa fille, car déjà on pouvait deviner qu’elle serait belle, comme toutes celles qui (loi mystérieuse !) sortent d’unions furtives et coupables! Pourquoi donc ce que les hommes flétrissent produit-il ce qu’il y a de plus beau ici-bas? « page 646 tome II . Ou encore « Pourquoi donc, autant qu’il faille aimer, n’aimerait-on pas la forme autant que la pensée, le corps autant que l’âme, pourquoi ? Aimez ce qui ne change pas, c’est un fort bon conseil, une économie de larmes, mais Dieu n’a pas voulu que ce qui est beau fût éternel… il est un généreux instinct du coeur de l’homme qui s’attache aux choses passagères, il faut qu’il enfonce ses mains dans ce qui croule, il faut qu’il meure d’aimer ces inanités si belles… « Fragment consacré à Armance du Vallon, sans doute 1835, O.C.I page 1248.
[13] Correspondance III p. 29.
[14] La pauvre Madame de l’Espinay est née bossue : « Je fus frappé de sa belle tête… une tête de chérubin sans ailes que Dieu avait roulée sur le buste déformé d’un démon qui s’était cassé la colonne vertébrale en culbutant du ciel. » Comment ne pas sentir là que Barbey accuse encore Dieu de cynisme et pire, d’injustice? Lettre à Trebutien, 1° septembre 1853. Même chose quand il cite Madame de Staël, laide de visage mais qui disait « assez fastueusement, en montrant les lignes de son corsage que Dieu avait mis là son vrai visage » article dans La Revue de mode de Paris, 10 novembre 1845.
[15] Correspondance, 1°octobre 1851.
[16] Bas-Bleus, page 115, Palmé, publié en 1878 mais écrit en 1855. Peut-on imaginer Eugénie répondant ainsi à Barbey qui se plaignait de sa laideur à lui, lui qui admirait tant la beauté de son frère Maurice !? Peut-être pas, mais en tout cas, dans la pointe contre Madame de Staël, on voit que Barbey sait se raidir fièrement contre une tristesse sans grandeur.
[17] « Avant que l’amour ne l’eût saisie dans sa griffe de flamme, elle avait été le type d’un de ces genres de beauté évidemment prédestinés au malheur, en raison même de la sublime délicatesse de leur forme. Cette délicatesse exceptionnelle, qui n’est pas de la beauté, – car la beauté a la force d’une harmonie, et, au contraire, cette délicatesse exquise, incomparable, vient peut-être d’un trouble, d’un élément céleste de trop dans la composition de l’être humain, – s’élevait en Madame de Mendoze jusqu’au phénomène. » p. 222 O.C.I.
[18] » Le capuchon avait disparu et la tête idéale de l’abbé put être vue sans aucun voile… Jamais la fantaisie d’un statuaire, le rêve d’un grand artiste devenu fou (…) n’auraient pu créer cette splendeur foudroyée » pages 727-8 O.C.I.
[19]p.645 O.C.I.
[20] cette complexification n’étant valable que pour les personnages principaux (la duchesse d’Arcos, Ydow, Serlon et Hauteclaire….). Dans la vie réelle aussi : Mme d’Agoult sous le pseudonyme de Daniel Stern, Madame de Girardin, le soleil…
[21]Article sur Eloa, mai 1860.
[22]Pour y arriver, Barbey rend Aimée et Calixte mystérieuses, l’une par sa rougeur, l’autre par son père d’abord : « la fille au prêtre est diablement jolie, mais c’est la fille au prêtre ! Puis, elle est malade. C’est, de plus, une sainte, un lis de pureté, dit le curé de Néhou, et, au fait, pour qu’il soit beau, ce lis-là, ce n’est pas le fumier qui a manqué, avec un tel père! » p 1004 O.C. I. La foule du roman ( mais aussi des lecteurs, espère Barbey !), tous veulent » savoir l’histoire de cet être qui, plus beau et plus virginal que la Cenci, la pure assassine de son père, semblait aussi porter comme elle le crime d’un autre sur son innocence. » Tous fixent fixent le signe qui attise leur curiosité : « ce bandeau rouge qui était teint de sang peut-être, et qui déshonorait les lignes idéales de ce front divin « p. 880, O.C.I, Un Prêtre marié.
[23] Un poète apôtre, ou Le Révérend Père Léon Barbey d’Aurevilly, par J.Dauphin, Delhomme et Briguet, 1891, pages 96-97
[24] donc le curé d’Ars se trouve l’égal de Bossuet, de Fénelon, et de Thérèse d’Avila. Article sur «Le Curé d’Ars, par le Père Monnin », publié dans Le Pays, le 18 octobre 1861.
[25]Barbey d’Aurevilly : Littérature étrangère. A propos de Poe.
[26] Un poète apôtre, ou Le Révérend Père Léon Barbey d’Aurevilly, par J.Dauphin, Delhomme et Briguet, 1891, page 339.
[27] sauf une modification minime d’un passage osé
[28] Il affirme clair que les romanciers catholiques peuvent peindre quelque chose qui n’est pas un exemple de moralité, pourvu qu’ils le disent tel. Hérodiade est diabolique peut-être, mais elle doit être belle quand même : « ils l’ont faite divine de beauté en regardant la tête coupée qu’on lui offre, et elle n’en est que plus infernale, d’être si divine! Mon ami, voilà, en tout comme l’art doit s’y prendre. » Lettre à Trebutien, 7 juin 1850
[29] cité page 282, Le XIX° siècle par J.Petit.
[30] dans Le Constitutionnel, 29 novembre 1869.
[31]page 25, Sensations d’art.
[32] Sensations d’art, page 213
[33]Sensations d’art, page 249.
[34]En fait, dans ses romans, il succombe encore parfois involontairement à « la religion de la beauté conçue comme une expression spontanée de la nature » mais s’en éloigne maintenant dans ses articles : il est du côté de Dieu, d’un Dieu inspirateur de l’esthétique et de « la religion de la vertu comprise comme une réforme de cette même nature» E.Seillières, page 20-22, Barbey d’Aurevilly, ses idées, son oeuvre, Paris Ed. Bloud 1910
[35]Ses amis mentionnent souvent son coeur d’or, son indifférence à sa pauvreté, sa générosité, et sa fidélité aux élans du coeur, qualités humaines, mais aussi son désir de convertir les autres parfois, son désir de servir l’Eglise etc. Nous ne pouvons citer cela ici, car ce n’est pas notre sujet, mais les témoignages concordent: en dehors des accès du critique ou du polémiste trop violent…
[36]Barbey d’Aurevilly, Catalogue de l’exposition de la Mairie de Paris, page 154