Arrêté du 19 décembre 2001 portant nomination à la conférence nationale de santé instituée par l’article L. 1411-1 du code de la santé publique[1]

JORF n°1 du 1 janvier 2002

Texte n°83

Arrêté du 19 décembre 2001 portant nomination à la conférence nationale de santé instituée par l’article L. 1411-1 du code de la santé publique[1]

NOR: SANP0124392A

Par arrêté du ministre délégué à la santé en date du 19 décembre 2001, sont nommés à la conférence nationale de santé instituée par l’article L. 1411-1 du code de la santé publique :

En tant que membres du collège des professions de santé exerçant à titre libéral :

Mme Marie-Hélène Abadie ;

M. Pierre Beras ;

M. Dinorino Cabrera ;

M. Bernard Capdeville ;

M. Michel Chassang ;

M. Claude Cohen ;

M. Pierre Costes ;

M. Georges-Eric Ernouf ;

M. Jean Gras ;

M. Henri Judet ;

M. Claude Maffioli ;

M. Jean-Jacques Magnies ;

M. Jean-Claude Michel ;

M. Louis Olie ;

Mme Marie-Jeanne Ourth-Bresle ;

Mme Dominique Plaete ;

M. Jacques Reignault ;

M. Jacques Roustit ;

M. Jacques Vleminckx.

En tant que membres du collège des institutions et établissements de santé des personnels qui y travaillent : 

Au titre des syndicats de médecins hospitaliers publics 

Mme Rachel Bocher.

M. Claude-François Degos.

M. Pierre Farragi.

M. Norbert Skurnik. 

Au titre des présidents de commissions

et conférences médicales d’établissements de santé 

M. Dominique Grimaud.

M. Antoine Perrin.

M. Alain Pidolle.

M. Jean Halligon.

M. Jean-François Lanoy. 

Au titre des personnels non médicaux exerçant

dans des institutions ou établissements de santé 

Mme Yolande Briand.

Mme Nadine Prigent.

M. Jean-Marie Bellot.

M. Eric Martin.

M. Bernard Sagez. 

Au titre des organisations

de l’hospitalisation publique et privée 

M. Jacques Brisson.

M. Didier Delmotte.

M. Louis Serfaty.

M. Alain Coulomb.

M. Alexis Dussol.

En tant que membres en qualité de représentants des régions :

M. Jean-Claude Fimbel (Alsace) ;

M. Joseph Vercauteren (Aquitaine) ;

Mme Françoise Nouhen (Auvergne) ;

Mme Simone Tollot (Bourgogne) ;

M. Joseph Niol (Bretagne) ;

Mme Françoise Moneger (Centre) ;

M. Jean-Claude Daniel (Champagne-Ardenne) ;

M. Dominique Casanova (Corse) ;

M. Christian Magnin-Feysot (Franche-Comté) ;

M. Hyacinthe Bastaraud (Guadeloupe) ;

M. Jean Parize (Guyane) ;

Mme Nathalie Simonnot (Ile-de-France) ;

M. Henri Pujol (Languedoc-Roussillon) ;

Mme Marguerite Rousselot (Limousin) ;

M. François Dose (Lorraine) ;

Mme Madeleine Ouka (Martinique) ;

Mme Magali Benoit-Marquie (Midi-Pyrénées) ;

Mme Thérèse Lebrun (Nord – Pas-de-Calais) ;

M. Christian Rouby (Pays de la Loire) ;

Mme Milica Bonisseau (Picardie) ;

Mme Véronique Rochais Cheminée (Poitou-Charentes) ;

Mme Muriel Roddier (Réunion) ;

M. Jean-Louis Lepee (Basse-Normandie) ;

M. Louis-Michel Wolf (Haute-Normandie) ;

M. Henri Mercier (Provence-Alpes-Côte d’Azur) ;

M. Claude Bouchet (Rhône-Alpes).

En tant que personnalités qualifiées :

M. François Bonnet de Paillerets ;

M. Marc Brodin ;

M. Bruno Groues ;

M. Eugène Pinsault ;

M. Marcel Royez ;

M. Patrick Brezac ;

M. Hubert Brin ;

M. Bertrand Garros ;

Mme Danièle Lacroix ;

M. Francis Peigne ;

M. Philippe Bergerot ;

Mme Chantal Deschamps ;

Mme Ruth Ferry ;

Mme Régine Goinere. 


[1] https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000398066&categorieLien=id

2001-2002 Conférence  Nationale de Santé

Actualités religieuses : le plus récent est en haut de ce simple « panier »…

On peut relire également un article de 2018, bien actuel sur les racines théologiques de problèmes concernant le cléricalisme et même la notion de sacerdoce : Le cléricalisme nécessite une … thérapeutique radicale ! Clercs, non-clercs et… doctrine

Réponse de la CIASE à l’Académie catholique de France. L’Académie avait mis en doute la valeur du rapport de la CIASE et avait voulu le déconsidérer. Mgr de Moulins-Beaufort, président de la CEF ( Conférence des évêques de France) , et Véronique Margron, présidente de la CORREF ( conférence des religieux et religieuses de France ) qui appartenaient à cette Académie en ont démissionné pour marquer leur désaccord. Jean-Marc Sauvé répond à cette Académie : https://www.lavie.fr/christianisme/eglise/rapport-sur-les-abus-dans-leglise-la-lecon-de-theologie-de-la-ciase-a-lacademie-catholique-80675.php

Taizé : Message de frère Aloïs pour l’ouverture du chemin synodal à Rome – Taizé (Cliquer ici).

la vidéo du débat du 12 janvier par Saint-Merry Hors-les-Murs : « la synodalité dans la vie des églises – approche œcuménique » peut être vue en replay.

Une conférence d’Aurélien Barrau au sujet de la crise du climat : clarté, hauteur de vue, réalisme, exemples donnés à Polytechnique, sans langue de bois…

Le Fr. J-.J. Pérennès s’exprime au sujet des relations entre musulmans et chrétiens. C’est, dit ce dominicain, «ce qui a fait la joie et le sel de ma vie depuis des décennies. C’est, je crois, un message assez urgent pour notre temps. » https://youtu.be/fEn5oXdc5ug

Le document préparatoire au synode qui nous est adressé : coloré, écrit gros, et qui finit par des questions qui nous sont adressées : lisons…

https://www.synod.va/content/dam/synod/document/common/preparatory-document/pdf-21×21/Documento-Preparatorio-FR-215.pdf … et ne nous privons pas d’y répondre : le diocèse de Paris a créé un site spécial synode et propose d’y travailler en petits groupes libres : https://synodeparis.fr/

« Où en est l’enseignement des faits religieux et de la laïcité depuis le rapport Debray ? » : 15 novembre, 14h, Paris

En 2001, le ministre de l’Éducation Jack Lang commandait à Régis Debray un rapport sur L’enseignement du fait religieux dans l’école laïque, rapport qui a joué un rôle décisif dans la création de l’IESR, devenu en juillet 2021 l’IREL – Institut d’étude des Religions et de la Laïcité. Vingt ans après ce rapport, quel bilan peut-on tirer des actions entreprises ? Afin d’évaluer l’opinion des Français sur ces questions, l’IFOP a rendu les résultats d’une enquête à l’IREL. À cette occasion, l’IREL organise une séance de conférences et de débats le lundi 15 novembre 2021 de 14h à 17h30 avec :14h, Didier Leschi (président du conseil de direction de l’IREL) et Philippe Gaudin (directeur de l’IREL)15h, Jérôme Fourquet (IFOP)16h, Isabelle Sain t-Martin (EPHE, directrice de l’IESR de 2010 à 2018) 16h45, Jean-Paul Willaime (GSRL, directeur de l’IESR de 2005 à 2010) 
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Retrouvons un principe d’Eglise :  « Ce qui concerne tous doit être discuté et approuvé par tous »

Publiée par Marguerite Champeaux-Rousselot, 20 août 2021

Quod omnes tangit, ab omnibus tractari et approbari debet.

Temps préparatoires au synode  des évêques sur la synodalité…

Nous sommes infiniment reconnaissants à Yves M.-J.Congar de s’être plongé dans ces textes qui vont du VIème siècle au XIII° siècle et nous restituent la vie des chrétiens, d’un  peuple de Dieu encore peu hiérarchisé et tout entier et uni : ces textes nous redonnent des droits souvent oubliés, droits de tous,  droits de frères, droits d’enfants de Dieu, ceux donnés par Jésus.

Il m’a semblé utile  et urgent de partager avec vous une partie  de la teneur d’un article  de cet Yves Congar, prêtre et théologien, en 1922… un de ceux qui sera le plus actif au Concile Vatican II. , qui  montre que son propre statut et ses droits ne sont pas différents de ceux des laïcs en ce qui concerne toutes, oui toutes les décisions prises en Eglise.  

Il fait le point historiquement, factuellement, sur une pratique de l’Eglise bien oubliée, effacée par une Tradition plus récente : la pratique enseignée par Jésus, celle où plusieurs réunis en son nom décident de qui les concerne, pratique  des premiers temps  chrétiens jusque vers le XIIIème siècle, effacée ensuite par une papauté soucieuse de son « pouvoir » inscrit comme quasiment divin et du pouvoir de ses relais, les clercs.

L’article[1] étant ardu et truffé de textes latins,   nous en avons rendu la lecture plus facile, mais le latin y figure quand même par souci de transparence.

Le texte intégral de l’article se trouve en ligne pour les références qui seraient incomplètes[2].

Retrouvons un principe d’Eglise :
« Ce qui concerne tous doit être discuté et approuvé par tous »
Quod omnes tangit, ab omnibus tractari  et approbari debet.

Un aspect démocratique dans l’organisation de l’Eglise ?!!? 

On entend souvent dire que l’Esprit Saint inspire l’Eglise, mais que c’est le Pape, tête de l’Eglise qui gouverne, et que telle est la Tradition apostolique depuis Pierre puis que l’Evangile montre Jésus lui remettant les clés et le troupeau : que telle est la Tradition apostolique depuis toujours.

Lorsque des affirmations ont de si grandes conséquences, lorsqu’elles semblent si étranges à notre époque, lorsqu’elles ont contribué à éloigner tant de personnes de l’Eglise institution alors qu’elles affirment que l’Evangile n’affirme pas cela, il n’est pas mauvais de voir ce qu’il en fut alors que Jésus ne semble pas avoir voulu de hiérarchie ni même de pyramide. 

« Ce qui concerne tous doit être discuté et approuvé par tous » est en fait la maxime  de bon sens qui a  servi de fondement pour l’organisation de l’Eglise jusqu’au  XIIIème siècle.

Cette pratique de l’Eglise bien oubliée, a été volontairement effacée par une Tradition plus récente qui date en fait du moment où une papauté soucieuse du salut des âmes a choisi de renforcer le pouvoir des clercs, leur pouvoir décisionnel en particulier.

Un article[3] d’Yves M.-J.Congar fait le point historiquement, factuellement, sur cette maxime fondamentale : il s’est  plongé dans les textes les plus anciens qui couvrent  jusqu’au XIIIème siècle et nous restituent la vie des chrétiens puis des catholiques, un groupe alors encore peu hiérarchisé : ces textes font ressurgir une organisation ecclésiale quasiment démocratique, souvent effacée des mémoires par la réforme grégorienne et le concile de Trente.

Il montre quelle maxime de droit en établissait des fondements sûrs :

Quod omnes tangit, ab omnibus tractari  et approbari debet[4].

« Ce qui concerne tous doit être discuté et approuvé par tous. »

Cette maxime, très utilisée, fut souvent par commodité abrégée par les premières lettres de ses trois premiers mots. Nous ferons  de même en transformant cet acronyme Q.o.t. en sigle : Qot, par commodité.

Le principe du Qot fut utilisé dans tous les domaines lorsque le droit s’affina en droit civil, privé comme public, en droit religieux, séculier et régulier, et même en droit politique

Notre article, partant du travail énorme d’Yves Congar, a pour but de rendre familière cette notion de Qot, de préciser qu’elle fut appliquée sans alternative dans l’Eglise jusqu’au XIIIème siècle,  d’en voir tout l’intérêt encore actuel et de fournir des arguments à qui souhaite diffuser ce principe. 

Plan :

(N.B. L’astérisque* permet de sauter d’une partie à une autre.)

1 Quod omnes tangit, Ce qui touche tous… : origine de cette maxime latine

2 Qot  concernant  le rôle de tous lors des décisions sur le gouvernement de l’Eglise

3 Qot  concernant la participation de tous aux décisions  des Conciles

4 Qot concernant la place de tous dans la prière, les sacrements, la doctrine, par rapport aux prêtres…   

5 Qot à l’intérieur des communautés religieuses… et ses essaimages inattendus en politique 

6 La fin du Qot avec le pape Boniface VIII  (1294-1303) et la réforme grégorienne

7 Un Bilan concernant les influences du Qot, passées et présentes

*1 Quod omnes tangit, Ce qui touche tous… : origine  de cette maxime latine

Yves Congar cite d’abord cette formule célèbre employée par  le pape Innocent III (1198–1216) :

« que selon l’autorité des décisions impériales, ce qui intéresse tout le monde doit être approuvé par tous.» 

Quum juxta imperialis sanctionibus auctoritatem ab omnibus quod omnes tangit approbari debeunt[5]. 

Une personne peut même être élue ou destituée si nécessaire quand cela n’a pas été respecté.

Il est intéressant de noter et de se rappeler une bonne fois pour toutes qu’il n’y avait pas, pour ce type de principe de base, de  distinction entre le domaine religieux et le domaine civil.

Y. Congar fait remonter ce précepte à une loi civile de Justinien, en 531, inséré dans la seconde édition du code qui stipulait la même règle que lorsque plusieurs tuteurs ont une tutela (tutelle, charge de responsable) individuelle :

« et en effet, il est absurde que leur administration commune soit décidée sans le consentement de tous, ou dans leur ignorance  de qui sera ordonné leur tuteur. Il est nécessaire que tous prennent part  à lui donner son autorité : que soit donc approuvé ensemble par tous ce qui les touche/intéresse semblablement » 

Etenim absurdum est solvi tutelam non consentiente, sed forsitan ignorante eo qui tutor fuerit ordinatus… Necesse est omnes suam auctoritatem praestare : ut quod omnes similiter tangit, ab omnibus comprobetur.[6]

Selon la coutume et la loi de cette époque, il faut partout obtenir le consentement de tous les intéressés pour une concession d’aqueduc ou pour tout jugement, dans le droit privé comme pratique finalement dans le droit public.

En 1206, le pape Innocent III  rappelle cette règle de droit, postulat de toute justice, de ne rien décider sans avoir entendu les intéressés  et discuté avec eux :

«  et en effet la raison/logique du droit exige que nous n’ordonnions rien au préjudice de ceux qui sont sujets des mêmes Eglises, lorsqu’ils n’ont été ni cités, ni convaincus ni par contumace s’ils sont absents. »  

Juris namque ratio postulat, ut in eorum praejudicium, quibus eaedem ecclesiae  subjectae, nihil ordinemus  de ipsis, quum nec citati sint, nec convincti, nec per contumacium se absentent…

Ce principe était donc bien connu dans l’Eglise, et il était mis en pratique.

Quelques textes parmi d’innombrables textes, dont Y Congar  a choisi les plus représentatifs :

Saint Bernard : « Il fallut écrire à tous au sujet de ce qui les regarde tous. »

                      Omnibus scribendum fuit de eo quod spectat ad omnes.  

Tous admettaient le principe suivant :

« Tous ceux que la chose en cause touche/concerne doivent être appelés. »   

Omnes illi quos causa (res) tangit vocandi sunt.

Innocent IV, le plus grand canoniste, commente une décrétale d’Alexandre IV :

«  Dans une transaction volontaire comme dans une composition, le consensus de tous ceux que la chose concerne,/touche est indispensable »   

In transactione voluntaria sicut in compositione, necessarius est consensus omnium quos res tangit. 

Un décrétiste, Bernard de Pavie et Jean d’André écrivent tous trois :

«  Quand on est questionné au sujet des droits, doivent être appelés tous ceux que concerne/touche la chose »

Quando inquiritur de juribus, debent vocari omnes quos res tangit, et nisi vocentur, vel etiam si ignorent, subvenitur eis de facili.[7]

Idem au procès de Jeanne d’Arc en 1452 ou 1453 : «  Bien que plusieurs personnes puissent être partie civile, comme tous deux que la chose regarde sont à entendre, et qu’elle regarde plusieurs personnes en général et en particulier … » (R. Pernoud, Vie et mort de Jeanne d’Arc, Paris, 1953, p. 39) 

Idem fin XIIème par Bernard de Pavie  pour tous les regroupements de gens, si nombreux à cette époque de corporations, collèges, monastères  etc. :

« Il faut donc qu’il soit su que, dans les choses qui doivent être faites ou organisées par un groupe/chapitre, le consensus de tous doit être requis, parce que ce qui touche tous, que ce soit approuvé ensemble par tous ! »      

Sciendum est igitur quod in his quae a capitulo fieri vel ordinari debent omnium consensus est requiendus, ut quod omnes tangit ab omnibus comprobetur. »[8]

Se reporter également au XIIIème siècle à toutes les  Regulae Juris publiées par Boniface VIII.

Le principe du consentement des fidèles n’était donc pas un vain mot.

Même si la décision n’était pas prise par les fidèles eux-mêmes, la décision proposée pouvait  être refusée.

*2 Qot concernant le rôle de tous pour les décisions sur le gouvernement de l’Eglise

En ce qui concerne plus spécifiquement les décisions de l’ordre du gouvernement de l’Eglise, l’Eglise s’en rapporte d’abord fondamentalement  aux Actes des Apôtres I, 23 s ; VI,5 ; XI,22 , XV,4 et 22 etc.

Y. Congar cite de nombreux exemples historiques : ainsi commente-t-il : « Clément de Rome ne fait vraiment que traduire  à son époque la pratique apostolique lorsqu’il précise que les apôtres et les autres personnages éminents  ont constitué certains hommes en charge  « avec l’approbation de toute l’Eglise ». Cette expression se réfère à l’épître de Paul, I Cor, XLIV, 3.

« Le consentement des fidèles à l’ordination des prêtres, ajoute-t-il, encore sollicité aujourd’hui dans des termes remarquables[9]est évidemment de tradition apostolique. Après Clément, Hippolyte en témoigne. »

L’Histoire des IIème et IVème siècles offre ensuite plusieurs exemples  d’Eglises refusant un autre évêque que celui  auquel la communauté  avait donné son adhésion[10].

Au début du Vème siècle, le pape Célestin Ier promulgue cette règle que reprendront les conciles d’Orléans de 549 et celui de Paris de 557 :

« Que nul  ne soit donné comme évêque à des gens malgré eux ».

Nullus invitis detur episcopus.

Peu après Célestin, Saint Léon formulé la même idée en une forme qui nous rapproche de la formule Qot :

« Celui qui devra les gouverner tous, qu’il soit élu par tous ! »

Qui praefecturus est omnibus ab omnibus eligatur[11].

Le pape Lucius III est  bien dans la tradition quand il précisait que tous les évêques d’une province devaient participer à l’élection et à l’ordination d’un nouveau métropolitain : élection solennelle par tous, présence de tous et unité consensuelle manifestée visiblement ;   pour un évêque ordinaire, il suffirait de trois  consécrateurs, aliis consentientibus[12] ».

*3 Qot concernant la participation de tous aux décisions des Conciles locaux

Y. Congar s’intéresse ensuite au fait que les fidèles participaient aux grandes décisions elles-mêmes prises dans les conciles locaux qui  organisaient  à diverses échelles les églises locales, (sans être œcuméniques) : Conciles africains sur lesquels nous sommes bien renseignés, gouvernement de  l’église de Carthage au temps de Saint Cyprien etc. Les domaines abordés sont de tous ordres. 

Saint Cyprien par exemple écrit à ses prêtres et à ses diacres que son  désir est d’« étudier en commun (avec eux) ce que demande le fait de gouverner l’Eglise (s.e.de Carthage), et, après l’avoir examiné tous ensemble, d’en décider exactement… m’étant fait une règle, dès le début de mon épiscopat, de ne rien décider sans votre conseil et sans le suffrage de mon peuple, d’après ma seule opinion personnelle. »[13]

*4 Qot concernant la place de tous dans la prière, les sacrements, la doctrine, par rapport aux prêtres…   

Le Qot s’applique en fait à ces questions qui touchent l’ensemble de toute l’Eglise : en effet, elle existe par la communion de tous autour de Jésus et de leur foi en Dieu : tous fils de Dieu. Jusqu’au XIIIème siècle, il existe certes une organisation, comme dans toutes les réalités biologiques individuelles et sociales humaines,  mais il n’y a pas de connotation de supériorité, ce qui serait contraire au paradoxe de l’Evangile qui prône des responsables « au service ».

La notion d’un sacré reposant par une volonté divine sur le prêtre en tant que personne précise et entre ses propres mains, n’est donc même pas encore évoquée. C’est pourquoi le Qot s’applique aussi dans ce qu’on peut appeler une délégation du peuple de Dieu à l’un d’entre eux, choisi par eux, garant, de maillon en maillon, de la communion avec l’Eglise  tout entière

Y. Congar rappelle entre autres  que le Amen signifie justement ce consentement des fidèles, dans l’Ancien Testament mais aussi dans  l’Apocalypse  et dans l’Eglise, jusqu’à la première description par Saint Justin[14] de la messe puis au texte de Tertullien de Saint-Augustin. Sans l’Amen des fidèles, une prière communautaire serait-elle ecclésiale ? une eucharistie serait-elle l’eucharistie ?

Concernant les assemblées eucharistiques, Innocent III, par exemple,  déclare dans un texte qui sera repris par Pie XII :

« Ce ne sont pas seulement les prêtres qui offrent, mais tous les fidèles avec eux. Car ce qui est rempli spécifiquement par le ministère des prêtres, cela est fait/agi de façon universelle ( = par tous)  par le vœu/la prière/la volonté des fidèles ».

Non solum offerunt sacerdotes, sed universi fideles. Namquod specialiter adimpletur ministerio sacerdotum, hoc universaliter agitur voto fidelium[15].

Il en était exactement de même pour les questions doctrinales : Y. Congar donne les références de nombreux textes qui montrent historiquement qu’on consultait, au nom du Qot, tous  les fidèles avant toute décision touchant à la doctrine.

Il en conclut : à cette époque « quelques-uns ont un magistère normatif ; mais tous sont éclairés et actifs.» Sur ce sujet, il  renvoie à un de ses ouvrages plus complet :  Jalons pour une théologie du laïcat, page 369 s.

Et Y. Congar, page 227 dans l’article ici étudié, de donner l’explication théologique de ces  relations :    

« le corps n’a pas à valider par une sorte de vote, les décisions du magistère, mais le magistère est assisté par le même Esprit qui anime le corps et il ne peut agir en dehors de ce conditionnement essentiel. Le principe hiérarchique justifie lui-même la validité de ses actes, mais il ne peut s’exercer, de fait, que dans une communion. C’est pourquoi, par exemple, dans chacune des deux grandes décisions dogmatiques du magistère extraordinaire de l’époque moderne, le pape a d’abord procédé à une consultation de toute l’Eglise.

C’est ainsi que, dans le triple domaine que comporte la vie de l’Eglise (gouvernement, sacrements, foi), la tradition alliait, à une structure hiérarchique, un régime concret d’association et de consentement».

C’est ce qu’on appelait le sensus fidei fidelium, le sens de la foi des fidèles : c’est lui qui  fondait légitimement  les choix de l’Eglise dans la mesure où il y avait eu  une consultation valable en amont.

*5 Qot à l’intérieur des communautés religieuses… et ses essaimages inattendus en politique 

Quant aux communautés religieuses, régulières, la pratique du Q.o.t. s’y fondait tout comme dans les communautés dans le siècle, mais également sur le fait que, en se réunissant à 2 ou 3 au nom de Jésus, la décision communautaire de pardonner est validée par Dieu : Matthieu, 18, v. 19 et 20. Également les textes des Actes des apôtres, 4, 32 et 11,42 47.

L’article cite de nombreux textes puisque les règles ont été fidèlement conservées et leur pratique de nos jours est très éclairante sur le Qot.

Entre autres choses, Y. Congar explique que ce système de consensus et d’écoute aura une certaine influence au moment où les rois cherchent à établir des règles pour diriger leurs grands  féodaux, leurs grands et leur peuple.

En effet, alors que les rois sont croyants et font partie de l’Eglise, le Qot reconnu de tous ne peut qu’exercer, parfois explicitement, toujours  implicitement, une influence qui préservera de la violence (et d’un absolutisme peut-être déjà concevable à la manière des tyrannies et des dictatures passées, mais qui était si visiblement  contraire à l’éthique de justice de l’Evangile qu’il était impossible à mettre en place  par un roi chrétien).      

Y. Congar n’oublie pas de citer l’emploi du Qot chez les Dominicains qui renforcent également ce système : en 1228, ces derniers initient un fort mouvement de représentation à l’intérieur de leurs chapitres généraux annuels.

«Cette innovation fut adoptée ensuite par les franciscains en  1239 et 1240 et chez certaines congrégations bénédictines. C’est ainsi qu’en 1248, le chapitre général de celle de Hambuye rendait cette institution obligatoire en l’expliquant dans ces termes :

«  Et parce que ce qui concerne tous doit être approuvé par tous, nous voulons et avons décidé que chaque couvent  envoie pour le chapitre évoqué auparavant un moine sélectionné, choisi d’un commun consensus, avec un abbé ou un prieur »   

Et quia, quod omnes tangit , ab omnibus debet approbari, volumus et statuimus, quod singuli conventus ad praedictum capitulum  aliquem monachum discretum de communi assensu electum cum abbate seu priore mittant.[16] 

Y. Congar rappelle que cette institution représentative dans ces ordres monastiques a même fini par influencer à la fin du XIIIème siècle par exemple les conseillers qui sont à l’origine du Parlement anglais.

Il explique ensuite longuement et précisément comment ce principe se répand en politique sauf quand il y a, par exemple  comme en France, une monarchie qui se veut de plus en plus puissante.

*6 La fin du Qot avec Boniface VIII  (1294-1303) et la réforme grégorienne  

Cette mise en pratique  du Qot aurait pu continuer à guider l’Eglise et à influencer les sociétés civiles, mais Boniface VIII (1294-1303) qui connaissait pourtant ces principes, voulut augmenter la puissance papale, et nous constatons que ce principe fut peu à peu contrecarré puis enterré…

Yves Congar décrit également dans son article, cet amenuisement progressif.

Les considérations finales d’Yves Congar :

« Il est temps de conclure cette histoire.

La maxime quod omnes tangit vient du droit romain, où il était un simple principe de procédure.

Porté par le courant communautaire du XIIe siècle, et plus foncièrement encore par le sens chrétien traditionnel en matière de vie politique, de vie ecclésiale et de vie religieuse communautaire, la maxime a vite pris une valeur plus large, dans le sens régime de conseil et de consentement.

Du domaine de la levée de taxes, qui engageait représentation et consentement, on est, dès le premier tiers du XIIIe siècle, passé à celui d’une  discussion des intérêts les plus généraux ; la philosophie politique d’Aristote, qui se répand à partir du milieu du XIIIe siècle, favorisa ce développement.

Par le jeu naturel des idées, mais surtout en raison de la montée de l’individualisme, de la critique de l’absolutisme fiscal, de la querelle entre Louis de Bavière et Jean XXII, enfin de la crise très grave ouverte par le Grand schisme, certains théologiens ont esquissé une application de notre maxime, érigée en principe de droit public, à la constitution même de l’Eglise.

Mais cette tentative a été complètement maîtrisée et éliminée par la victoire, définitive, de la doctrine romaine de la Monarchie pontificale. »

Et… Yves Congar a mis un M majuscule à Monarchie.

*7 Un Bilan concernant les influences du Qot, passées et présentes 

La maxime juridique romaine quod omnes tangit… a été employée jusqu’au XIIIème siècle, en des temps où, d’ailleurs, le religieux ne souhaitait pas se distinguer fondamentalement du civil, le civil lui semblant son niveau basique.  

 « Ce qui intéresse tout le monde doit être approuvé par tous » : cette  maxime simple et solide relevait et relève en effet et du bon sens populaire et de la Règle d’or. La foule ou le groupe expriment ses besoins et se fait confiance pour en organiser elle-même la mise en œuvre pratique.

De par le Qot, le droit et l’autorité naissent du consensus de tous et non d’une simple opinion personnelle ou  du vouloir d’un seul. Les décisions se prennent en commun, de façon semblable, de façon égale  (communiter, pariter, similiter). Rien ne doit être fait contre le gré des personnes concernées. Le Qot. va de pair avec les termes écoute, dialogue, respect, consensus, consentement, choix, élection aux deux sens du terme, représentation, communication, discussion, collaboration, coopération, synodalité, conciliation, transparence, égalité de droits, approbation, humilité, service,  etc.  De l’avis communautaire, qu’il soit en amont ou en aval ou les deux,  naît la validation de la décision. L’autorité d’un responsable ne peut s’exercer  que dans ce cadre qui la reconnaît et l’accepte : elle est  reconnue en amont par ceux que cela concerne, et en aval  le responsable doit répondre  de ses décisions devant eux. En matière politique, l’écoute et la représentativité garanties par le Qot fonctionnent aussi  comme base, au moins théorique : ce ne sont pas encore la centralisation, les privilèges, l’absolutisme qui  la remplacent comme principes à la base des organisations sociales et religieuses.  

Avec le Qot, en Eglise, comme l’Evangile demande à tous explicitement de ne pas céder à la tentation du pouvoir et de la richesse, de l’égoïsme et de l’orgueil ; il prône le paradoxe évangélique : le respect des plus fragiles, la cohérence de la foi et de l’amour dans l’humilité et le service. Les disciples de Jésus formant l’Assemblée peuvent alors s’organiser de façon relationnelle, mobile, avec des élus pour un temps défini, responsables devant la communauté, pour son bien ( peut-on parler d’évaluation ? ). Elle s’organise ecclésialement,   dans ses différents modes et modules, sans contrainte légale  ni sanctions, librement et de façon adaptée, de maillon en maillon, créant réseaux et niveaux, en communautés réunies par les liens de relation, sans hiérarchie ni interne ni externe, mais par la participation et la communication qui créent la communion, comme dans un corps humain où ce qui touche tous doit être décidé par tous.

Ce principe du Qot s’applique ainsi dans ce cadre, à l’élection des évêques, au choix d’un prêtre ou d’un diacre, dans les communautés monastiques ou  les petites églises, pour des services (actions, conseils, enseignements, liturgies etc.).

De l’avis communautaire, en amont ou en aval naît la validation de la décision et l’autorité qui permettra une gestion fraternelle et co-responsable. Même si chaque décision n’était pas prise en amont à leur niveau par les fidèles eux-mêmes, toute  décision proposée pouvait  en aval être refusée par eux. Lors de la prière, l’Amen de tous explicite et valide la proposition avancée par l’Ecriture ou par un responsable. En matière de religion catholique, la spécificité reconnue du prêtre (élu) pour tel ou tel service ou fonction etc. est en quelque sorte incluse dans l’universalité des fidèles et tous sont conscients que cette spécificité n’existerait pas sans eux : elle dépend d’eux, sans qu’il y ait de notion de supériorité d’un côté ou de l’autre.

Cependant au début du XIVème siècle,  face aux abus analysés comme venant de trop de liberté, certains, pensant  asseoir mieux le pouvoir de Dieu et sauver plus d’âmes, ont voulu réformer l’Eglise.

Boniface VIII a commencé à séparer les clercs du reste des fidèles en les reliant plus directement au sacré qui les rendait en quelque sorte définitivement et par définition  plus compétents que les simples fidèles. Contrairement au principe du Qot, les fidèles, même pourtant concernés, n’eurent progressivement plus le droit de donner leur avis ; l’autorité du pape et de ses clercs fut censée venir de Dieu et de l’Esprit Saint qui les inspirait spécialement : une hiérarchie naissait, dotée aussi de puissance matérielle pour mieux convaincre. Le Droit religieux se séparait du droit civil et ne tarderait pas à s’en réclamer comme supérieur.  

Grégoire VII, au XVème siècle, prit beaucoup de ses décisions au nom d’une nouvelle maxime qui mettait Dieu au centre de tout : « Ce qui touche à Dieu … »   Cette formule Quod Dei tangit  a été elle aussi abrégée ( QDt) car elle a été très utilisée par une papauté désireuse de contribuer à « sauver » les âmes, ce qui lui a semblé passer  par  son « pouvoir » inscrit désormais comme quasiment divin et relayé par « ses » clercs.

Le pape ou le clerc décidait de ce qui touchait, non plus des êtres humains comme les autres, mais avant tout des « fidèles » ; les consultations  n’étaient plus pratiquées : ceux qui étaient  concernés par les questions à traiter auraient  risqué de se tromper dans leurs choix. Le Qot inutile pouvait être nuisible et  il ne fut plus en usage. Le sensus fidei fidelium  lui aussi a été remisé : les fidèles  n’avaient plus de compétence. Il a, sauf exception,   quasiment disparu de l’image que les catholiques ont d’eux-mêmes et de leurs « droits » de baptisés.

Ainsi l’article d’Y. Congar  remet-il  au jour 13 siècles de pratique  de cette maxime qui a été quasiment complètement effacée de nos mémoires depuis le XIVème siècle par ce que certains appellent la Tradition ou la Monarchie sans précision de dates.

Les Lumières et Vatican II ont tenté de remettre au jour cette pratique positive, civile comme ecclésiale. Elle est à la base de nos démocraties civiles aujourd’hui, mais Vatican II n’a pas « réussi » de ce point de vue.

Les  révélations récentes concernant les abus en tous genres de l’Eglise ont montré que certains abus relèvent d’individus mais que d’autres relèvent de questions systémiques[17], d’un oubli du paradoxe évangélique[18], de dérives liées à de l’irrationnel  présenté comme inspiré par l’Esprit Saint…

A la réflexion, selon nous, ces abus et ces erreurs pourraient être liés en grande partie à l’effacement de ce Ce qui touche tous doit être approuvé par tous, la maxime simple et solide qui avait structuré l’Eglise parce que en accord avec l’Evangile de ses fondateurs.

Le système de Ptolémée a été remplacé par le système de Copernic qui avait été déjà conçu par Eratosthène…

Il serait possible pour les chrétiens catholiques de quitter une voie obsolète qui les isole pour  remettre en pratique à la maxime  qu’ils utilisent  partout ailleurs : « Ce qui concerne tous doit être discuté et approuvé par tous ».

Elle n’est pas contraire  à leur évangile, au contraire.

Des sociétés antiques l’avaient déjà promue et en avaient commencé la mise en place. L’évangile est allé plus loin, puisque dans le Royaume de Dieu il n’y a plus d’esclaves ni de mineurs à perpétuité ni d’exclus de ces droits. La fraternité vient d’une égalité  qui n’y est pas conditionnelle et où le Qot fonde l’Assemblée.

De quoi méditer en ces temps de Synode sur la synodalité qui revient à la charge par un autre chemin.

Marguerite Champeaux-Rousselot

(2021-08-20)


[1] Quod omnes tangit, ab omnibus tractari et approbari debet, par Yves M.-J.Congar, Revue Historique de droit français et étranger, 1922-)Quatrième série, Vol. 35 (1958), pp. 210-259 (50 pages), Dalloz.

https://www.jstor.org/stable/43847329

[2] https://www.jstor.org/stable/43847329?read-now=1&refreqid=excelsior%3A55323203e09e7cc38c2cd3fadefc1eeb&seq=49#page_scan_tab_contents

[3] Quod omnes tangit, ab omnibus tractari et approbari debet, par Yves M.-J.Congar, Revue Historique de droit français et étranger, 1922-)Quatrième série, Vol. 35 (1958), pp. 210-259 (50 pages), Dalloz.

https://www.jstor.org/stable/43847329

[4] Pour les non-latinistes :

Le verbe tangere  signifie toucher, concerner, intéresser..  Il a donné en français tangible et tact.

Le verbe tractari, au passif ici, signifie « être discuté, être traité  » et il a donné traiter de, détracteur, contrat

Le verbe approbari au passif ici signifie « être approuvé ».

Debet signifie  « doit »

[5]C. 7, X , I , 23 ( Friedberg, 11,152  ) Potthast, 5031.

[6] C. 5, LIX, 5.

[7] G. Post ( Traditio, 1946, p. 203-204  : Jean d’André, sur les Décr. de Grégoire IX, 2,27, 25, quamvis.

[8]  Summa Decretalium, ed.E.A.T. Laspeyres, Ratisbonne, 1860, p. 75

[9] consentement des fidèles à l’ordination de l’évêque ( Trad. apostol., c2) et consentement des prêtres à l’ordination des diacres (c9 ; trad. M. Botte, p. 40)

[10] Cf. Gr. Dix , dans Apostolic Ministry. Londres, 1946, p 277-278.

[11] Epist. X,4 ( P. L. 54,628) , Comp. Epist. X,6 : XIII,3 ; XIV , 5 ; CLXVII,1.

[12] C. 6, X, 1, 11 ( Friedberg, II, 119) : Si archiepiscopus obierit et alter fuerit ordinandus archiepiscopus, omnes episcopi ejusdem provinciae ad sedem metroplitanam conveniant, ut ab omnibus ipse eligatur  et ordinetur. Oportet autem ut ipse, qui illis omnibus praeesse debet, ab omnibus illis eligatur  et ordinetur. Reliqui vero comprovinciales episcopi , si necesse fuerit, ceteris consentientibus, atribus jussu archepiscopi peterunt ordinari ; sed melius est, si ipse cum omnibus eum, qui dignus est, elegerit, ou et cuncti pariter pontificem consecraverint.

Rappelons que la Glose ordinaire commentait ainsi les mots  ab omnibus de cette Décrétale : Not. Quod omnes tangit, ab omnibus  comprobari debet. ( cité par G. Post, das Traditio, 1946, p.04, n.35).

[13] Nihil sine consilio vestro et sine consensus plebis mea privatim sententia gerere : Epist. XIV, 1,2 et 4 ; trad. Bayard. Comp. Epist. XXXIV, 4,1 ; XXXII, etc.

[14] Apol. I, 65 et 67. Comp. St Jérome , In Galat. ( P. L. 16,355) ; Eusèbe , H.E., VII, ix, 4.

[15] Innocent III, De sacro altaris mysterio, III, 6  ( P.L. 217, 845). Cité dans l’encyclique Mediator Dei du 20 Nov 1947. (Ed. Roguet, n. 82. Une possible interprétation erronée est écartée, ibid. n. 90, un complété par le  n. 99)

[16]Cité p. 22 par J. Jassmeier, Das Mitbestimmungerecht der Untergebenen in den älteren  Männerordensverbänden  ( Münchener Theol. St. Kan. A bt, 5). Selon Y. Congar, cet ouvrage présente une histoire bien documentée du développement du droit des subordonnés à participer aux décisions dans les Ordres religieux d’hommes.

[17] Le retour (contraignant comme un chantage à l’Enfer)  à la sacralisation  et au rituel  dont Jésus  était sorti ; un idéalisme quasiment pervers et un symbolisme hypertrophié et chosifiant, etc.    

[18] Ex d’inversions des valeurs du monde : le plus petit est le plus grand, donner sa vie, c’est la gagner…  .

2021-07-12 Le portique des Athéniens à Delphes révèle-t-il un programme athénio-delphien ? Devons-nous réviser certaines de nos conceptions ?

Un article par Anne Jacquemin et Didier Laroche, récemment  publié sur internet , à propos du  Portique des Athéniens à Delphes[1],  donne des éléments archéologiques concernant la datation et son objectif.  

Cette lecture nous a incitée à quelques réflexions  d’ordre moins matériel que nous partageons en toute simplicité : nous reprenons les éléments factuels donnés dans l’article, comme points de départ d’un questionnement plus ample.

Les indices  listés par les auteurs concluent en définissant une fourchette chronologique  de 510-490. Or il n’ pas été bâti   à la suite aux guerres médiques: après Marathon, les Athéniens ont offert la base et le trésor voisin, plus tard le monument érigé à l’instigation de Cimon dans la partie méridionale du sanctuaire ( SD  110). Ce n’est pas pour la bataille de Platées : ils ont consacré les boucliers pris aux Perses et aux Thébains sur l’entablement du temple. .Ce n’est pas non plus, enfin, pour l’Eurymédon : ils ont dressé une statue d’Athéna sur un palmier en bronze près du temple.)

C’est probablement  après la grande victoire navale  sur Égine vers 491 (Hdt. 6.88-92) qu’il a été  édifié, et ce sont sans doute les témoignages directs de cette dernière victoire qu’il contenait. On note d’ailleurs que  c’est le prototype d’une nouvelle espèce architecturale : ce qui confirme cet objectif. Par la suite, ce système de « portique » se diffusa largement, pour répondre aux mêmes besoins ailleurs.

Les auteurs font remarquer que ce portique des Athéniens   a été bâti sur l’espace de rassemblement principal des Delphiens, en prenant même sur lui.

Or les Athéniens s’étaient déjà engagés à doter le sanctuaire panhellénique d’un temple monumental en partie en marbre. Il était superflu qu’il vienne le compléter d’une façon aussi spectaculaire: il avait  donc un autre objectif.

Il venait compléter le temple à valeur spirituelle (et médiatique) par un bâtiment à visée ouvertement plus politique et médiatique.

Ce complément avait visiblement pour objectif de permettre  à la cité d’Athènes de disposer d’un lieu panhellénique de démonstration de sa puissance nouvelle sur terre et sur mer à travers des éléments directs et indirects. On peut parler d’un programme  architectural  portant un programme religieux et politique, ou politique et religieux.

Que ce programme ait été conçu et réalisé montre l’étroitesse des liens existant en 491 environ entre Delphes et Athènes, le prix  ( dans tous les sens du terme)  qu’Athènes accordait à figurer à Delphes, et  la place ( dans tous les sens du terme ) que les Delphiens lui firent.  

Cela  incite à se poser diverses questions liées entre elles : nous en citons de façon non limitative.

Si ces liens Delphes-Athènes  n’étaient pas exclusifs mais à proportion de la puissance,  qu’en était-il   à Delphes de la place  matérielle et spirituelle faite aux cités hostiles à Athènes ? Cela ne modifie-t-il pas la conception que nous avons de la religion grecque, de ses sanctuaires, de leurs liens avec la société ?

L’ambitieux  et coûteux programme athénien devait être «  rentable » pour Athènes. IL avait été certainement établi après mûre réflexion.  Il ne peut s’être limité à bâtir à Delphes. Il a certainement été décliné dans divers domaines : arts, littérature ancienne revisitée, prières et cultes modifié, réécritures de mythes, orientés tous  pour y inscrire Athènes et sa puissance.

           Ces liens ne fonctionnaient-ils que dans ce sens, Athènes édifiant à Delphes les signes de son pouvoir politique   ?  ou le pouvoir spirituel de Delphes  avait-il sa contrepartie dans le culte et les édifices à Athènes ?  Peut-on penser que la « place » d’Apollon à Athènes augmenta  de façon quasi-volontariste ? Et inversement que la place d’Athéna à Delphes augmenta également ? Cela ne se traduisit-il pas positivement en monuments, en symboliques communes,  comme résultant d’influences réciproques ou de bijections plus ou moins contraintes, mais aussi en essayant également de diminuer la  renommée d’autres lieux qui se revendiquaient comme apolliniens  (Délos  en particulier) ?  Ceci pouvait se faire hostilement en tentant de les éliminer, de façon ambiguë en les absorbant ou en s’y installant côte à côte, ou amicalement en s’y reliant..  Il nous semble que si nous observions ce qui se passe à Athènes d’un œil aiguisé par cette question, on trouverait des éléments qui en augmenteraient l’intérêt. 

Ce renforcement mutuel entre  Athènes et Delphes est-il concerté  ou non ? A-t-on affaire à un programme athénio-delphien ou  à une évolution naturelle faite des  choix individuels  d’une société vivante ?  

           Devons-nous considérer  que, Athènes étant  la plus « riche », son influence a tenté  ou non d’être quasi-monopolistique ou totalitaire ? Ne doit-on pas faire une place beaucoup plus grande aux intentions des « auteurs » ( cela comprend les artistes en tous genres) dans les textes qui nous sont parvenus , et en particuliers  dans les variantes des mythes ? Cela ne change-t-il pas de façon radicale notre définition du terme « mythe » appliqué indistinctement à la Grèce  de toutes les époques ?  Arriverait-on enfin à étudier des textes anonymes comme s’ils étaient d’un auteur connu contemporain ?      

Autre question : Athènes étant alors plus riche, plus célèbre, plus dynamique, plus productive, nous devons nous poser la question de savoir si  les témoignages qui nous sont parvenus de l’Antiquité sont  déséquilibrés. Il en va de même  pour toutes les civilisations  et les cultures passées et même contemporaines, ce qui fait que  mémoriellement les pauvres « n’existent »  pas ou presque pas, même de leur vivant.

Ce type  de question se pose de façon  bien plus argumentée depuis que l’archéologie (efficace, il faut bien le reconnaître, en gros, depuis moins de cent ans pour les périodes antérieures à  la période hellénistique)  peut atteindre finement les couches  antérieures spatio-temporelles tant dans le sol  et la matière des traces et  objets subsistants  que  dans le fond et la forme des objets humains que sont les textes et les artefacts.  On s’aperçoit ainsi – parfois avec incrédulité d’abord –  qu’il y avait un autre monde avant  l’Apollon du V° siècle, d’autres dieux, d’autres Apollon ailleurs et  plus anciens… Bref que notre vision   de la Grèce passait – je ne mentionne pas les problèmes de réception et transmission  – par la vision humaniste,  héritière simplificatrice de la vision romaine, qui reprenait  à sa façon la  vision quasi-totalitaire de l’âge d’or d’Athènes.

Bonnes réflexions…

Marguerite Champeaux-Rousselot

Post-doctorante EPHE,

CRATA.  

MCR=


[1] Le Portique des Athéniens revisité, par Anne Jacquemin et Didier Laroche, 2019, in From Hippias to Kallias . 

https://www.academia.edu/49768271/LE_PORTIQUE_DES_ATH%C3%89NIENS_REVISIT%C3%89?email_work_card=title

Enseigner nos valeurs : Lettre d’une enseignante de lettres classiques en lycée, Brive, oct. 2002

à Monsieur le Ministre.

        

Je vais essayer de faire court, pensant que si mon idée vous intéresse, vous me recontacterez.

            Je suis professeur de Français en lycée, et je trouve qu’en ce moment, il est très difficile de permettre aux parents de reprendre courage dans leur rôle de parents,  Nous essayons de le faire au sein de nos associations familiales ou de parents d’élèves, mais on y voit plutôt  – j’utilise volontairement leurs mots – les deux extrêmes : parents souhaitant être de bons parents, ou parents ayant de très graves problèmes, liés souvent d’ailleurs à des problèmes matériels et sociaux.

Le centre de cette courbe de Gauss, que nous voyons trop peu à l’école ou aux  Associations, se dit souvent dépassé, reste souvent muet, ne sait/peut  pas écouter  parce qu’il  n’est pas confiant dans ses capacités de réponse.  Tous les réseaux, tous les stages sont mieux que rien… Mais le temps passe.  

Il faut donc reprendre les choses, pour les futures générations, à la base de l’école, des toutes petites classes  jusqu’à la fin  des études, (si tant est qu’elles sont finies un jour). …

Je dis très vite dans l’année à mes élèves qu’il n’y pas de modèle unique,( ils acquiescent )  certes, mais que tout ne se vaut pas. (  là dessus, ils protestent vivement !)   Que toutes les morales et les religions ne se valent pas : celle du dieu Moloch où l’on sacrifiait les enfants  ou celles où  existent des castes, des sexes inférieurs,  des mariages forcés ou des mutilations me semblent moins bonnes que celles qui  intègrent déjà les droits de l’ Homme par exemple ; ou des règles comme « ne fais pas  à autrui ce que tu n’aimerais pas qu’on te fasse », celle-ci étant moins belle que « fais à autrui ce que tu aimerais qu’on te fasse ».

Il est donc possible encore aujourd’hui, dans cette époque de tolérance, de respect et de raison, d’enseigner les valeurs, avec de l’autorité, pour la responsabilisation et l’autonomie, pour le Bien de la société et des individus qui la composent ;

Encore faut-il que  les parents, les enseignants, les éducateurs  au sens le plus large – et qui dit que mes enfants ou mes élèves ne m’enseignent pas des choses ? – et les élus, éducateurs eux aussi,  le sachent !

.

Je suis en Lycée, niveau bac et il vient d’y avoir une réforme. Le bac sera plus intéressant et moins scolaire : il y a moins de par cœur. Les objectifs à atteindre ont été bien recensés et ils sont logiques  d’une certaine façon et conformes au Français littérature, écriture, esthétique …

 Mais  cependant, vu les urgences sociales,  je ne cesse de me lamenter en mon for intérieur sur la pauvreté du contenu  des programmes  quant au fond.

Pourtant j’aime le Français et les jeux sur la forme ! Je fais partie d’équipes de recherche, et je suis docteur ès lettres.

Mais  on insiste beaucoup trop sur la forme, et encore d’une façon discutable, et, d’autre part, on n’insiste pas assez sur le fond, pas assez sur ce qui élèverait le jeune et lui donnerait ces valeurs qu’il n’entend pas  évoquer assez souvent..

Je vais développer ces  deux idées. 

Dans les petites classes, l’expression quasi libre est stimulée et permise ; les freins retirés ( comme orthographe, grammaire, souci de la forme, souci du « juste » et de la qualité, souci du classement et de l’évaluation  ). Sans doute pour  ne pas faire de peine et ne pas « coincer ». Mais c’est  en fait simplifier la tâche de l’éducateur, au détriment de la réussite de l’élève. Le bon éducateur est celui qui sait faire accepter à l’élève les critiques  et qui arrive à le faire progresser avec le sourire et sublimer.  Supprimer  ce qui rend difficile la tâche véritable  de l’éducateur  est une trahison pour celui qui aurait dû être éduqué.

On a supprimé les « fautes » d’orthographe, de grammaire, de style.

Mais on a aussi supprimé les exigences sur le fond.

Et on a aussi éjecté la morale.  ( Avez-vous déjà regardé des livres ou des cahiers  de 1930 ou 1950 ? )   

Dans les grandes classes, alors qu’ils se préparent à la vie active avec ce que cela implique  de « combativité », on a baissé le niveau d’exigences : les passages de classes, l’absence de moyenne, l’absence de classement, le passage de classe  automatique, les appels, les arrondissages de notes, la « conformisation » aux moyennes  … tout cela sape le moral et la morale, donne  à ceux qui font des efforts le sentiment de l’injustice, amortit vite le goût de bien faire  etc.

On a donc supprimé le côté « formel » de la vie.

Côté Français  par contre, dans les grandes classes, les programmes  visent essentiellement  la forme des textes : registre,  genre, figures de style, énonciation, discours etc.  … Que sais–je. On leur apprend à faire des pastiches, à écrire dans tel ou tel style … pour s’approprier de l’intérieur le style. Bonne idée, bien sûr, pour les meilleurs surtout.   Choses qui sont passionnantes  et riches d’humanité à la fin, mais  combien  ennuyeuses pour ceux qui ne sont pas littéraires dans l’âme.  Peut-être utiles une fois qu’on se spécialise dans ces domaines …, une fois le minimum acquis.

De plus, quand on s’occupe avec les élèves de la forme, on insiste bien souvent, pour les intéresser, voire les amuser, pour ne pas sembler «  dupe » soi-même, sur les plagiats, les pastiches,  les tics, et on se sert également d’auteurs qui se sont moqués des réussites de certains auteurs connus qu’on veut dépoussiérer. Bien sûr, pratiquer le pastiche prouve qu’on a compris les moyens dont se sert l’auteur … Mais ils sera toujours plus facile de critiquer  et de reproduire un défaut, que d’analyser et de reproduire ce qui a été réussi, plus facile de faire une caricature que de faire un vrai portrait, un dessin laid et comique plutôt qu’un dessin fidèle, un dessin se prétendant fait en une seconde et « de chic », naturel, plutôt que quelque chose  fruit de travail. La sévérité et l’  « esprit » sont souvent mieux portés que la bonté.. La rapidité, la spontanéité, se portent mieux que la lenteur et l’approfondissement..  du moins tant que cela reste au niveau de l’intellectuel. Car qui accepterait qu’un  plombier, un médecin ou un juge se vante d’avoir fait vite, et de se moquer que ce soit mieux … Nous sommes déjà trop portés spontanément à la facilité, au prix même de la laideur  ( tags, caricatures, moqueries, charges, irrespect. ) Apprendre, en fait de communication, à  démonter les moyens du discours de l’autre, je ne crois pas que ce soit plus utile que d’apprendre  à dialoguer vraiment,  à exprimer ses idées, à repérer dans le discours de l’auteur ce qui est valable, puis ce qui cloche.

Je constate qu’on nous fait étudier – en ayant bien sûr le droit de porter un jugement sévère éventuellement – de nombreux auteurs qui ne sont pas de petits saints  ( se droguent, Baudelaire et Rimbaud ;   libertinage,  Laclos,   Sade ; adultère, Hugo ;   alcool, Verlaine ;   antisémitisme,  Céline ;  machisme, Montherlant ;  homosexualité, Proust ;  il y a trop d’exemples et j’arrête là ma liste d’auteurs ;   fanatismes divers, du religieux au communisme, folies présentées comme des exemples,  suicides, dépressions …) Les textes choisis sont bien souvent ceux qui  vont être paradoxaux, violents, ironiques …  Cela  donne tout de suite un air plus intelligent.   Un livre est le produit d’un autre moi que celui que nous manifestons en société … Certes, mais le vrai moi est là tapi dans l’ombre et il est normal et instructif  qu’on montre aux élèves les ressorts de l’œuvre … même inconscients.  

Pourquoi ces auteurs sont-ils étudiés et portés au pinacle et étudiés, y compris dans les classes  de collège, là où le jeune se forme, écoute, cherche des modèles ? car leurs textes sont beaux  au point de vue de la forme  et intéressants. Or c’est cette forme qu’on nous demande surtout de faire étudier aux élèves ( après la leur avoir fait négliger d’ailleurs dans ce qu’ils ont à faire eux-mêmes ).. Et puis il serait très dommage et nuisible même,  de tout sélectionner d’un point de vue moral … C’est au professeur, quand il le veut, quand il ose, quand il en a le temps, et c’est délicat et difficile, de faire le réajustement nécessaire. Et vous savez comme les élèves, et bien souvent le public même adulte, prennent tout au premier degré. (C’est d’ailleurs là dessus que joue la TV par exemple, qui paie des sommes élevées pour une minute de pub ou une image « accidentelle »).

Je pense quant à moi qu’il est utile que les élèves se soient frottés à tout  et qu’ils aient appris à bien choisir… mais qui leur apprendra à bien choisir dans ces textes souvent  de moralité discutable ? Qui, puisque souvent les parents ne le font plus, que la religion n’est plus enseignée au caté, ni la morale à l’école ? qui l’apprendra aux futurs parents ?  Cela va-t-il être dans la rue ou à la TV ?

Alors je me demande pourquoi  on ne ferait  pas autant étudier la forme sur des textes dont le fond est « beau » ou utile à la vie ?  ? Auteurs majeurs ou mineurs,  genres  différents du roman, théâtre ou poésie  …

Ces textes pour le moment  sont souvent considérés comme d’auteurs mineurs, d’œuvres mineures, car moins à la mode,  ( il semble que la mode, ou les intellectuels, craignent  en ce  moment d’être traités de « moraux » et qu’il y ait une mode du « rebelle », « pathologique » «  grave » etc. ).

Et pourtant on y trouve autant de figures de style, de biographies ou d’apologues,  de registres et de discours indirect libre, d’énonciation,  de focalisation etc.  que dans les textes immoraux ou amoraux ou antimoraux.

En outre, certains textes d’auteurs célèbres sont magnifiques également au point de vue du fond.  

Mais quand je vois, dans un livre de textes choisis récemment paru supprimer Corneille, et, dans le même temps y mettre Sade et Laclos, je ne comprends pas … Ce que nous apprend Laclos ou Sade  au point de vue du style peut être remplacé, au niveau du lycée, par d’autres auteurs. 

Et qu’on ne dise pas qu’avec Laclos et Sade, on peut justement faire de la morale. C’est lourd, pour nous, de faire de la morale (en plus du programme !), et de tenter de contrebalancer dans notre discours personnel de «petit prof» banal ce qui est «écrit » ou vu. Beaucoup prennent tout au premier degré et en   particulier quand cela les arrange. Si l’auteur n’a pas contrebalancé son texte lui-même, il reste avec son discours. Vous savez la force ( et le coût) de la seconde de publicité à la TV …  Le grand film ou l’interview, qui ne sont pourtant pas réellement payés par un lobby pour faire de la pub pour la violence, l’alcool, l ‘égoïsme ou la paresse,   font  la pub pour les comportements déviants, du simple fait d’avoir été visionnés  si rien ne vient les contrebalancer. Ainsi quand les enfants jouent aux Tortues Ninja, ce qu’ils en retiennent c’est non pas l’argument moral, mais la bagarre. Et si à 22 h, on a le discours des psychologues  ou des conseillers conjugaux, c’est un peu tard : l’antidote n’est pas pris par ceux qui ont vu les images précédentes.. Ces images perçues ( « à tort » diront peut-être ceux qui écrivent ou filment) comme des « modèles » ont de graves conséquences sociales et individuelles, relationnelles, sanitaires etc.

Il en est de même en classe. 

Pourquoi au lieu de nous faire étudier « l’autobiographique » ou « l’épistolaire », ou « l’apologue », n’étudierait-on pas justement, à travers ces même cadres encore si nécessaire,  l’honneur, l’honnêteté, l’altruisme, le respect, la vie de famille, le dialogue, l’écoute, la parentalité, la maternité, la fraternité, le bon prof, la courtoisie,  l’égalité homme-femme etc.

Tous sujets qui préparent à la philo, à la vie, à la société, à l’individualité, à l’humanité  …

Du fait qu’on nous fait beaucoup étudier la forme, au  moins serait-elle  étudiée sur des textes  porteurs de  sujets qui peuvent apporter  beaucoup à l’élève comme modèles, comme réflexions, comme  discussions sur des sujets de leur vie, dans la limite de ce que le Ministère fixerait..

            Il y a  de nombreux textes chez les plus grands auteurs  également qui peuvent se prêter à ces leçons de morale, discrètes, mais  permanentes, qui permettraient aux jeunes, si souvent idéalistes en réalité, de le rester et que leur monde soit plus beau …

            C’est une optique  à mettre en œuvre.

            Je signe : une mère, une prof, une citoyenne inquiète et qui voudrait bien que, puisqu’un modèle n’a pas été tout à fait satisfaisant, on le modifie dans une logique de bon sens.

L’homme ne naît pas spontanément bon, ni mauvais d’ailleurs, peut-être. La société peut l’empirer  ou lui apprendre à devenir pire ou meilleur, c’est selon.  Les parents appartiennent  à la société.. Ils ont été formés par elle car ils ont été enfants.

Parents et Ecoles,  religion et laïcité humaniste avaient le même discours.

La religion a pratiquement  disparu ou a changé son discours. La laïcité ne dit plus à temps et à contretemps son humanisme altruiste, l’école a éliminé presque totalement la morale, et les enfants, démunis, deviendront des parents nus. C’est déjà ainsi, mais on a encore les grands-parents.   

On finit par rougir de dire les valeurs vitales… et d’avoir à argumenter sans savoir si notre discours a porté.

Pauvre petit prof contre un auteur. Pauvre intellectuel contre celui a qui a « vécu »[1] cela, ou qui a la notoriété  et la reconnaissance, sinon sociale, du moins  des éditeurs et du Ministère …

Il est temps de faire cesser ce cercle vicieux  qui n’est pas si vieux.

La littérature, au moins jusqu’au bac,  ne devrait pas  faire de l’esthétique  aux dépens de l’éthique et de la société.

Même les parents ne  font pas exprès, et de façon programmée, raisonnée et volontaire,  intellectualisée et fière, de montrer aux enfants  ce qui peut détruire  l’éducation qu’ils souhaitent leur donner.

Un texte raciste ne serait-il pas raciste quand il est beau ? Alors il en est de même pour tout texte destructeur.

Comment vérifier qu’il n’y pas  eu de ravage dans les valeurs du jeune ?

Et cette coupure qu’on fait ici entre ce qui est de l’ordre prétendu de l’intellect, n’est-ce pas encore  une aggravation de la coupure entre l’école et la vie ? entre les fruits de l’école et  la vie ?     

Si on souhaite, ce qui peut se comprendre,  ne pas faire de « protectionnite », de censure, si on veut, à un certain âge, leur apprendre la totalité de la vie et le choix,  et si on veut, comme c’est le devoir des éducateurs et des responsables de la société, leur faire voir  ce qu’est une attitude à ne pas suivre d’un point de vue social, qu’on leur donne un antidote en même temps et déclaré comme tel, et aussi fort, et aussi attirant …

Vu le niveau des élèves, il ne faut pas penser qu’ils trouveront la morale par eux-mêmes au second degré. 

Actuellement, les futurs parents, les enfants d’aujourd’hui n’ont plus cette formation initiale.

Il faut la redonner et à travers toutes les matières, et même s’il faut aussi les aider à atteindre les lectures au second degré voire plus  pour leur permettre de tout lire sans censure, il faut aussi leur donner le premier degré. … et permettre aux enseignants des élèves futurs parents et citoyens, de le faire facilement et sereinement, sans complexe, et en solidarité  avec leur ministère et la société dans son ensemble.

C’est là que vous devez aider les enseignants…

C’était un appel au secours !

Je serais contente, ainsi que des parents et des enseignants avec qui nous en avons discuté,  de recevoir autre chose qu’un aimable accusé de réception. 

Je vous prie de croire, monsieur le Ministre, à l’expression de toute ma considération, et des espoirs que nous sommes nombreux (sans doute la majorité silencieuse des enseignants, des parents et des élèves,  et bien d’autres en responsabilité) à mettre en vous.

                                                                                    Marguerite Champeaux-Rousselot

Brive, lycée, octobre 2002


[1] Et il n’y a d’éducation dit-on souvent, que par l’exemple

Liban, pays que nous aimons, par Jacques Gaillot, (2020-08)

Toi dont nous admirons la beauté, te voici défiguré.
Toi dont nous apprécions la douceur de vivre, te voici précipité dans l’abîme.
Toi qui pratiquais si bien l’hospitalité de l’Orient, tu connais brusquement la misère.
Liban, pays que nous aimons, ta douleur est la nôtre,
Ton drame nous bouleverse, ta détresse nous laisse sans voix.
Mais le peuple libanais se dressera de nouveau, tel le cèdre majestueux du Liban.
Il renaîtra de ses cendres avec l’espoir qui ne l’a jamais quitté.
Avec lui, le Liban sortira de l’ombre avec le courage de l’avenir et la solidarité qui se manifestera de partout.
Avec lui, le Liban retrouvera sa beauté, sa douceur de vivre, et sa place au milieu des Nations.
Vive le Liban, pays que nous aimons.

Jacques Gaillot
Evêque de Partenia

Imaginer les gestes-barrière contre le retour à la production d’avant-crise, par Bruno Latour (2020 – 03)

2020-04-07 Bruno Latour P-202-AOC-03-20

Allez lire cet  article qui m’a semblé remarquable par sa largeur de vue et sa capacité prospective.

J’y ajoute  un commentaire …

Il s’agit pour nous de donner au mot « crise » toute sa valeur  : le terme vient du grec krinô  qui signifie voir, discerner, juger  juger; une racine qui a donné en latin  cerno d’où le français discerner… 

Tout ne doit pas repartir …

Nous prenons conscience en ce moment de ce qui est nécessaire /superflu;  de ce qui est utile/nuisible ;  de ce que nous maîtrisons/ ou  non ;  de la puissance de la Nature et de la faiblesse de notre  espèce ; de l’équilibre de la Nature à laquelle notre espèce s’est adaptée au fil de millions d’années  et de la capacité exponentielle de nuisance   de certains  groupes humains ne réfléchissant  pas plus loin que leur ego…

Mettons toutes nos forces à  un effet-cliquet   pour empêcher des tentatives de retour en arrière  en oubliant les leçons de la crise. Il ne peut être question de rattrapage, de retour, de « comme avant »  ou d’ « autant »   mais de « mieux ».
Mettons toutes nos forces de réflexion sur le long terme, sur les choix à faire.
La  machine était devenue écervelée  ( rien d’étonnant ) et folle, le conducteur somnolait … Un cliquet de sécurité a joué déclenchant la sirène d’alarme  et arrêtant  pour un temps les dommages.

Empêchons  une reprise irréfléchie  dans les conditions précédentes :  l’Etat a des moyens d’infléchir  d’une façon souple et compréhensible par tous  : pas d’aide d’Etat pour certaines entreprises, voire certaines personnes :

  • celles qui  donnent  des dividendes aux actionnaires au delà de l’indice de la consommation par exemple  et prennent alors sur les deniers publics
  • celles qui ont des fonds dans les paradis fiscaux ou consacrent une part trop grande de leur énergie   et des fonds qu leur sont confiés à trouver et profiter des niches fiscales
  • celles qui n’infléchissent pas leur production à vendre en tenant compte des aspects planétaires de notre biotope commun à tous
  • celles qui comptent sur les autres sans faire réellement l’effort en contre partie qui leur sera demandé

Cela impliquera sans doute des reconversions et des sélections , des mots qui nous inquiètent aujourd’hui certes,mais qui  sont positifs  puisque ce sera laseule façon de pouvoir encore aider ceux qui  enont réellement besoin ensuite.

Les aides doivent être orientées  pour permettre aux entreprises de régler leurs dettes , mais les aides  ne sont pas faites pour  refaire comme avant . D’ailleurs, certaines entreprises, si on les aide à redémarrer comme avant feront faillite peut après …
Qui peut croire en effet aujourd’hui que nos impôts directs et indirects ne vont pas augmenter et que notre  niveau de vie ne va pas être impacté?
Il est donc évident et prévisible que nous, 4 personnes sur 5 peut-être,   aurons des budgets bien plus serrés : nous irons donc moins au restaurant, au théâtre, en voyage,  dans un magasin d habits de marque,  et achèterons moins de produits qui auraient voyagé en avion… Toutes ces entreprises, ces métiers,  doivent se reconvertir,  sans attendre et préventivement,  dans des secteurs  qui seront porteurs et que nous avons discernés pendant cette période de confinement : production plus locale pour circuits courts, éducation, hygiène, écologie, services ( lutte pour une bonne justice financière,  prévention des violences, des  comportements nuisibles à la santé  et aux autres etc. ),  techniques utilisation  le virtuel pour remplacer les déplacements trop coûteux  ou la culture  trop « luxueuse »… ou  trop abondante en offre aidée  non concertée, éducation à la simplicité goûteuse du beau  et de la vie etc.

Il s’agit pour nous de donner non seulement au mot « crise » toute sa valeur, mais encore  de profiter de toute la valeur  de  la crise elle-même.

Ce n’est pas un retour que nous devons viser, un  retour qui ferait revenir une crise inévitablement pire.

Nous devons pousser de toutes nos forces pour infléchir la direction et reprendre le contrôle pour aller  vers un mieux.

Marguerite Champeaux-Rousselot ( 2020-04-26)

Petit Corona discute avec papa ( 2020-03-04)

Une vidéo à écouter comme une fable  fort stimulante  pour notre réflexion : je ne crois pas qu’un Etre ait envoyé le coronavirus, mais que les Lois de l’évolution  et de la vie régulent  notre Planète  quand il y a des déséquilibres.

https://             youtu.be       /6aF-           4f3qu           Eg

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Le lien marche sur Google, mais il n’est pas accepté sur face-book donc par précaution, je  l’ai rendu inopérant depuis mon site.